Évangile : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie : recevez l’Esprit Saint »
C’était après la mort de Jésus ; le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur.
Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »
Homélie :
La fête de la Pentecôte célèbre l’accomplissement du mystère pascal, avec l’effusion de l’Esprit Saint. Pourtant les textes de la liturgie que nous venons d’entendre peuvent nous sembler contradictoires car l’Esprit Saint semble avoir été donné aux apôtres à deux moments différents : Le soir de Pâques selon l’évangile de Jean et le 50e jour d’après les Actes des Apôtres.
En fait, Pâques et Pentecôte sont les deux faces d’un même acte salvateur. La Résurrection du Seigneur et le don de l’Esprit Saint sont l’expression de l’amour infini du Père. Dès l’instant de la résurrection de Jésus, la création nouvelle est inaugurée. Pâques est un jour unique dont la célébration se déploie au fil du temps.
Le don de l’Esprit Saint est déjà réalisé sur la croix lorsque Jésus rend l’esprit. Lorsqu’il souffle sur ses disciples le soir de Pâques, il leur donne l’Esprit Saint qui n’a toujours fait qu’un avec Lui. Et ce don est amplifié au matin de la Pentecôte et ne cessera plus de se réaliser tout au long de la vie de l’Église. En situant cet événement 50 jours après Pâques, la liturgie de l’Église reprend le cadre des fêtes juives. 50 jours après la Pâque, la Pentecôte était la fête de la moisson et commémorait l’Alliance et le don de la Loi, comme le rapporte le livre de l’Exode.
L’action de l’Esprit Saint est exprimée dans le récit des Actes des Apôtres au moyen de symboles. C’est d’abord celui du vent violent : Esprit et souffle sont en hébreu un seul mot. Ce vent rappelle l’Esprit qui planait sur les eaux au moment de la création. C’est le vent qui précède la manifestation de Dieu sur le mont Sinaï. Il remplit la maison où se trouvent les disciples. Il en résulte un mouvement qui se communique à tous ceux qui touche. Il nous faut accueillir ce souffle et le laisser ranimer notre vie et la rendre féconde.
L’esprit se manifeste aussi comme un feu. C’est le Feu de l’Amour qui transforme tout ce qu’il brûle et réchauffe. Nous avons chanté dans la séquence « Veni Sancte Spiritus » : Assouplis ce qui est raide, réchauffe ce qui est froid. » Ce feu vient reposer sur chacun de ceux qui sont réunis et leur donne la force de l’amour et de la Parole. Ils peuvent annoncer les merveilles de Dieu à tous les hommes réunis à Jérusalem, chacun les entendant dans son propre idiome. L’Esprit Saint rassemble dans l’unité les peuples et les cultures, tout en respectant leur identité propre et leur diversité car sa langue est celle de l’amour et de la communion.
Ce récit des Actes des Apôtres n’est pas si étranger à l’évangile de Jean que nous venons d’entendre. Il ne fait que rendre manifeste à tous les hommes le don de l’Esprit Saint déjà accordé aux apôtres le soir de Pâques, mais de manière confidentielle.
Les disciples ont eu besoin, depuis la première apparition de Jésus ressuscité, de grandir dans la foi, d’intérioriser et de s’approprier cette merveille inouïe que la résurrection de Jésus et ses conséquences. C’est pourquoi, dès ce moment, l’Esprit Saint les a éduqués, a ouvert leurs yeux et leurs cœurs. Entre l’ascension et la Pentecôte, retirés dans la chambre haute, ils ont laissé leur esprit et leur cœur se préparer à la mission qu’ils avaient déjà reçu de Jésus le soir de Pâques.
Jésus commence par leur donner la paix, cette paix qu’il a chèrement acquise au prix de sa vie et qui est maintenant fondée en sa résurrection. Jésus s’est livré sur la croix pour effacer nos péchés. Sa mort et sa résurrection sont la preuve suprême de son amour. Et maintenant, c’est la mission qu’il confie à ses disciples : Pardonner les péchés à tous les hommes qui se convertiront et croiront en Jésus. Dès le jour de la Pentecôte, les apôtres – et nous voyons Pierre le faire au nom des autres – annoncent la Bonne Nouvelle de Jésus, mort et ressuscité pour le pardon des péchés. Tous ceux qui accueillent leurs messages croient en Jésus et se convertissent, ils reçoivent le baptême pour le pardon des péchés.
La Pentecôte est la naissance de l’Eglise. Au soir de Pâques, les disciples étaient seuls au Cénacle, et encore pas tous, car Thomas n’était pas avec eux et Judas n’avait pas été remplacé par Mathias. Au matin de la Pentecôte, ils sont réunis avec Marie et d’autres disciples. Ce petit groupe annonce l’Eglise qui va alors se développer au souffle de l’Esprit. Désormais l’action de l’Esprit ne cessera pas de nous émerveiller et de nous surprendre. Il agira dans l’Eglise de façon toujours nouvelle, et souvent bien au-delà de ses limites visibles, ces limites que nous sommes toujours tentés de vouloir fixer et qu’il nous faut dépasser. Il fait surgir la vie divine là où on l’attend le moins. Il suscite partout des chercheurs de Dieu qui attendent de recevoir sa vie.
Et l’Esprit Saint ne cesse de répandre ses dons. Grâce à Lui, se construit le Corps de l’Eglise, le peuple des croyants. C’est ce que nous rappelle l’apôtre Paul dans la première épître aux Corinthiens. Les dons de Dieu sont variés, les services sont variés, les activités sont variées, c’est toujours le même Dieu, Père, Fils et Esprit Saint, qui agit en tout et en tous.
L’Esprit Saint abolit nos différences. Nous sommes tous sauvés par la mort et la résurrection de Jésus, animés par l’Esprit Saint. Nous sommes l’unique peuple de Dieu, riche de sa diversité. Rendons grâce pour l’amour de Dieu répandu dans nos cœurs.
Frère Claude
Prieur du Bec