Paroles de la salle du Chapitre – S43

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Catégorie : Vie monastique

Dimanche 24 octobre :

Avec les psaumes de Vêpres et de Complies, tel que le propose saint Benoît au chapitre 18 de sa Règle, l’ensemble du psautier se trouve ainsi réparti sur la semaine. Il y a une plénitude dans ce chant de l’office où nous sommes engagés à servir le Seigneur en union avec toute l’Église. C’est un des effets de notre baptême.

Comme l’aveugle Bartimée de l’Évangile d’aujourd’hui, nous prions avec foi, nous rendons grâce et nous supplions Jésus de nous guérir de nos aveuglements. Mais nous sommes aussi appelés à aller plus loin puisque nous avons un service à accomplir, une mission particulière en tant que disciple du Christ, et l’office divin est un des éléments de notre service pour le Christ. Nous sommes ses disciples, et en union avec toute l’Église, nous avons le devoir de prier pour tous les hommes, pour l’humanité entière.Lundi 25 octobre :

On remarque, à la fin de ce chapitre 18, la discrétion et l’humilité de saint Benoît : il vient de proposer une répartition des psaumes pour la semaine, mais il n’en fait pas un absolu : « Nous avertissons expressément que si cette distribution des psaumes ne convient pas à quelqu’un, il peut établir un autre ordre qu’il jugera meilleur, pourvu toutefois que chaque semaine, le psautier soit chanté en entier avec ses 150 psaumes ».

La mesure que propose saint Benoît se veut raisonnable ; il n’est pas question d’imiter les anciens qui pouvaient réciter tout le psautier en un seul jour. Il faut concilier tous les aspects de la journée : temps de prière au chœur et en cellule, travaux divers… Si c’était une bonne mesure au temps de saint Benoît, il faut que chaque communauté trouve son juste équilibre en fonction de ses possibilités du moment. Aujourd’hui, si une plus grande souplesse est accordée, l’office reste toujours  la priorité de la communauté. C’est notre premier devoir et il nous faut être conscient de la responsabilité que nous avons dans l’Église et pour le monde. Même s’il y avait moins de psaumes, nous ne pourrions pas négliger l’office divin.

 

Mardi 26 octobre :

La célébration de l’office divin, l’œuvre de Dieu, demande toujours un acte de foi. Saint Benoît le dit dès le début de ce chapitre 19 sur ‘’la discipline du chant’’ : « Nous avons foi que la divine présence est partout… » Et il ajoute : «  Mais à un degré éminent, croyons-le d’une conviction parfaite, lorsque nous prenons part à l’œuvre de Dieu. »

Saint Benoît cite plusieurs psaumes (Ps. 2,11; 46/47, 8 et 137/138, 1) pour bien confirmer cette présence de Dieu pendant l’office. Et Dieu est d’autant plus présent que nous le chantons avec les paroles mêmes de Dieu ; les psaumes étant des chants inspirés. On peut éclairer ce chapitre par les paroles de l’apôtre Paul aux Romains : ‘’L’Esprit vient au secours de notre faiblesse en priant dans notre cœur’’ (Rm. 8). Et en même temps, c’est cet Esprit qui peut unifier tout notre être intérieur, qui peut l’accorder à notre propre esprit et à notre voix avec ce que nous chantons et proclamons. Mais nous savons aussi que cela ne se fait pas en un seul jour car nous sommes souvent dispersés, tiraillés, n’habitant pas suffisamment avec nous-mêmes. Il y a tout un travail nécessaire de conversion, d’unification de nous-mêmes à reprendre chaque jour et que justement, l’Esprit-Saint peut nous aider à réaliser en nous ; il suffit de le laisser nous guider.

 

Mercredi 27 octobre :

Après avoir détaillé l’organisation des différents offices, saint Benoît revient sur l’attitude intérieure qui doit être la notre en ces moments liturgiques. L’office demande un cadre, une attention mutuelle, une discipline commune. Quand il est terminé, on peut prolonger la prière personnelle dans la supplication.

Il y a interaction entre l’office divin et la prière personnelle ; ils sont complémentaires. Dans l’un et l’autre cas, nous sommes en présence de la majesté divine et l’Esprit-Saint inspire la prière en venant au secours de notre faiblesse. Mais que la prière personnelle ait lieu en cours de l’office, dans les moments de silence, ou après, saint Benoît recommande la mesure et la discrétion.

 

Jeudi 28 octobre :

Dans ce chapitre 21 sur les doyens du monastère, saint Benoît ne cherche pas à mettre tel ou tel membre de la communauté au-dessus des autres ; il leur demande plutôt d’avoir le souci des autres membres. La pratique de la décanie n’a plus vraiment cours aujourd’hui ; tous, nous sommes appelés à avoir le souci des autres frères, surtout les malades, les plus faibles et les plus fragiles. En tant qu’ancien, nous avons une responsabilité envers les plus jeunes, non pas tant par des discours que par le témoignage d’une vie authentiquement donnée.

Cette sollicitude requiert plusieurs qualités ou attitudes de la part de chacun. Il faut pratiquer la bonté, cette bonté qui est donnée par Dieu, et vivre selon ses commandements. Saint Benoît demande aussi qu’on choisisse ces anciens selon le mérite de leur vie et leur connaissance de la sagesse. Cela ne veut pas dire que nous méritons quelque chose, mais que nous avons simplement à faire ce que Dieu nous demande, humblement et sans chercher à nous mettre en valeur.

Quant à la connaissance de la sagesse, il ne s’agit pas tant de discours, de paroles, que de vivre et de pratiquer la Loi du Seigneur dont la Règle est une expression. Il faut que nos paroles soient en accord avec nos actes.

 

Vendredi 29 octobre :

Souvent, dans l’histoire de la liturgie ou dans d’autres domaines de la vie de l’Église, on a donné des significations spirituelles et symboliques à des détails qui n’avaient, à l’origine, qu’un aspect matériel et très prosaïque. C’est le cas, par exemple, dans ce chapitre 22 sur ‘’comment dorment les moines’’, de la lampe qui reste allumée jusqu’au matin, de l’habit et de la ceinture qu’on garde pour dormir.

Cela n’empêche pas de trouver une signification à ces détails, surtout lorsqu’on les interprète à la lumière de l’Évangile.

La nuit est le temps de l’attente du retour du Seigneur, et les paraboles de la vigilance sont ainsi évoquées. Etre prêt pour le premier office, c’est aller à la rencontre de l’époux comme dans la parabole des dix jeunes filles où on voit que le temps du sommeil n’empêche pas d’être prêt. Comme dit le Cantique des Cantiques : « Je dors, mais mon cœur veille ».

 

Samedi 30 octobre :

Ce chapitre 23  est le début d’un ensemble traitant de la pénitence. Le titre de celui-ci peut paraître très fort : ‘’l’excommunication pour les coulpes’’, car il semble dire que celui qui a autorité rejette un membre  coupable, comme autrefois les papes excommuniaient un roi ou un pays en rébellion contre eux. Il faudrait parler peut-être, de mise à l’écart, de réparation, en voyant bien que c’est le fautif qui se coupe lui-même de la communauté, qui s’excommunie, car saint Benoît montre bien que c’est l’abbé ou les anciens qui cherchent, au contraire, à ramener le coupable dans le corps communautaire par la miséricorde.

Saint Benoît énumère, en début de chapitre, les cas qui peuvent amener à cette situation : rébellion, désobéissance, orgueil, murmure, opposition à la Règle. Dans ces différents cas, le frère se place en dehors de la communauté ; il se pose en juge et pense qu’il est sur le bon chemin en ayant raison contre tous les autres. La critique et le murmure sont un poison social, car ils ne construisent pas, mais détruisent.

Il nous faut donc garder une attitude humble et chercher à améliorer ce qui peut faire difficulté. L’attitude de l’humilité et de la miséricorde vaut autant pour ceux qui ont à reprendre un frère à la dérive, que pour celui-ci. C’est de cette manière que nous pouvons construire le corps ecclésial. Il faut faire taire en nous la tentation du murmure corrosif pour écouter le murmure de l’Esprit-Saint qui parle à notre cœur.

 

 

Père Claude
Prieur du Bec