Le doute de Thomas (Jn 20,19-31)

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Catégorie : Homélies

2ème dimanche de Pâques -A- 2020

Nous sommes tentés de passer très vite sur la première partie de cet évangile, pour nous arrêter au retournement de Thomas. C’est vrai que le scepticisme de l’un des Onze, devant l’incroyable de la résurrection, nous rassure : nous ne sommes donc pas seuls a être assaillis de doutes. Thomas est un frère, pragmatique, qui ne se laisse pas impressionner par les emballements collectifs. Mais que nous révèle le début de cet évangile, auquel Thomas, d’ailleurs, sera associé bientôt ?Jésus souffle sur les Dix en leur conférant l’Esprit Saint : le même souffle que lors de la création de l’homme (cf. Gn 2, 7) ! Il s’agit d’une véritable résurrection : les apôtres sont recréés dans la puissance de l’Esprit Saint, l’Esprit qui a relevé Jésus de la mort. Et, dans la dynamique de cette recréation, ils sont oints pour poursuivre la mission-même du Christ, celle de libérer les hommes du péché et de les introduire avec lui dans la gloire du Père.

Cela veut dire que la réception de l’événement de Pâques, comme mystère de foi, par les témoins qui ont vu le Ressuscité, forme un tout avec le fait lui-même: sans cette réception, qui fait du croyant un ressuscité avec le Christ, vain serait son passage de la mort à la Vie. La mission de témoins qui incombe à tout baptisé est fondée là : nous sommes membres du Christ, appelés à faire croître son corps, en lui agrégeant tous les hommes. La mission n’est pas une propagande, une publicité, en faveur d’une doctrine ou d’une morale particulièrement favorables à l’entente entre les hommes ; elle est le partage d’une grâce merveilleuse de Vie et de bonheur.

Le témoignage chrétien commence donc par l’accueil de cette grâce qui fait de nous des hommes et des femmes recréés dans le Christ. Cet accueil n’est jamais fini, car jusqu’à la fin, l’humain en nous reprendra le dessus, oubliant ou même refusant sa condition de ressuscité. La Vie nouvelle reçue au baptême et confirmée par le don de l’Esprit, doit se traduire, s’exprimer alors par un comportement tout autre face à la réalité de l’existence et de l’histoire : « Recherchez les choses d’en-haut », dit saint Paul aux Colossiens, qui poursuit : « revêtez des sentiments de compassion, de bienveillance, d’humilité, de douceur, de patience… Que règne en vos cœurs la paix du Christ… Que sa parole habite en vous… Tout ce que vous pouvez dire ou faire, faites-le au nom du Seigneur Jésus, en rendant grâce par lui à Dieu le Père. » (Cl 3, 1…17)

Ainsi, célébrer la mystère pascal, c’est nous engager à en témoigner, car Pâques est une réalité présente et une promesse pour tous. Nous qui ne soutenons aucun système, qui sommes aussi incertains de l’avenir que tout le monde, qui partageons les pauvretés et les faiblesses des hommes, qui sommes toujours ‘confinés’, censés nous tenir à distance, puissions-nous dire au monde l’amour et la miséricorde de Dieu, Son désir du bonheur pour tous, Sa foi en nous. L’homme retrouvera alors sa dignité de fils de Dieu et sa destinée ultime dans le Christ ressuscité.

 

Fr. Paul Emmanuel
Abbé du bec

Le geste de doute de saint Thomas