Évangile : Jésus, comme Élie et Élisée, n’est pas envoyé aux seuls Juifs
En ce temps-là, dans la synagogue de Nazareth, après la lecture du livre d’Isaïe, Jésus déclara : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. » Tous lui rendaient témoignage et s’étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche. Ils se disaient : « N’est-ce pas là le fils de Joseph ? »
Mais il leur dit : « Sûrement vous allez me citer le dicton : “Médecin, guéris-toi toi-même”, et me dire : “Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm ; fais donc de même ici dans ton lieu d’origine !” » Puis il ajouta : « Amen, je vous le dis : aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays. En vérité, je vous le dis : Au temps du prophète Élie, lorsque pendant trois ans et demi le ciel retint la pluie, et qu’une grande famine se produisit sur toute la terre, il y avait beaucoup de veuves en Israël ; pourtant Élie ne fut envoyé vers aucune d’entre elles, mais bien dans la ville de Sarepta, au pays de Sidon, chez une veuve étrangère. Au temps du prophète Élisée, il y avait beaucoup de lépreux en Israël ; et aucun d’eux n’a été purifié, mais bien Naaman le Syrien. »
À ces mots, dans la synagogue, tous devinrent furieux. Ils se levèrent, poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline où leur ville est construite, pour le précipiter en bas. Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin.
Homélie :
L’Évangile que nous venons d’entendre fait directement suite à celui de dimanche dernier. Jésus, au début de son ministère, est dans la synagogue de Nazareth, un jour de sabbat. Il est au milieu des siens. Il vient de lire l’oracle du prophète Isaïe, au chapitre 61. Ce texte, le voici : » l’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’il retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur. »
Jésus, rappelons-nous a été baptisé par Jean dans le Jourdain, un peu auparavant. Le Père l’a désigné comme son fils bien-aimé et l’Esprit-Saint a reposé sur lui, se manifestant sous l’apparence d’une colombe. Dès ce moment, jésus commence sa mission. Il est envoyé par son Père pour proclamer la bonne nouvelle du Royaume de Dieu. Sa parole fait autorité. Elle est la parole même de Dieu. Et des signes viennent authentifier sa puissance, ces signes qui sont annoncés dans l’oracle d’Isaïe. C’est pourquoi Jésus peut dire pour tout commentaire : » Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. » C’ est une parole en actes. C’est un message de grâce. C’est l’amour du Père qui se manifeste par lui.
Et cette parole est toujours actuelle. Nous avons été baptisés dans la mort et la résurrection de Jésus. Les personnes divines sont venues habiter en nous. Et pour que les effets du baptême soit encore plus explicites, nous avons reçu – ou plusieurs d’entre vous le recevront bientôt – le sacrement de la confirmation. C’est le don de l’Esprit Saint qui est descendu sur les apôtres à la Pentecôte et a fait d’eux des témoins courageux du Christ ressuscité. Il est descendu sur tous les nouveaux baptisés et les a rassemblés par la charité en un seul corps, l’Église. Il les a envoyés à la suite des apôtres, témoigner que le Seigneur veut sauver tous les hommes.
Il descend sur nous aujourd’hui et transforme nos vies. Il nous fait passer des ténèbres à la lumière. Il nous envoie témoigner de son amour auprès des pauvres, des souffrants, des opprimés, de tous ceux qui ne voit pas de sens à leur vie, mais qui attendent la lumière et l’amour. Et ces pauvres, ces aveugles, ces opprimés sont souvent tout près de nous. L’Esprit Saint viens ouvrir nos yeux et nos cœurs.
Après ce commentaire de Jésus sur l’oracle d’Isaïe, l’évangéliste dit que tous lui rendaient témoignage et s’étonnaient de la parole de grâce qui sortait de sa bouche. Et leur attitude va changer.
Jésus ne s’impose pas. Ses compatriotes ne peuvent pas imaginer qu’il soit plus que celui qu’ils connaissent depuis 30 ans, le fils du charpentier. Il ne peut être que l’un deux. Ils ont sur lui un regard réducteur. Mais Jésus n’est pas venu pour un cercle étroit est fermé. Sa mission est universelle. C’est ce qu’il rappelle en évoquant les prophète Élie et Élisée. Ils ont été envoyés à des païens : Élie à la veuve de Sarepta, Elisée au syrien Naaman. Ils ont montré que Dieu vient sauver tous les hommes, et pas seulement un peuple limité. Il ne se laisse pas enfermer dans un monde étroit. Il en va ainsi de Jésus.
Déjà le prophète Jérémie a été appelé pour être » un prophète pour les nations « . Son message s’adresse aux chefs de son peuple, mais va au-delà. Il en est de même pour Jésus. Il doit avancer à contre-courant. Il rencontre la contradiction et le rejet et nous savons que Jésus paiera de sa vie l’accomplissement de sa mission. Il en sera de même pour ses disciples, depuis les débuts de l’Église jusqu’à maintenant. Il y aura toujours des persécutions. Le message de Jésus dérange, il bouleverse l’ordre établi, il renverse les fausses valeurs et rappelle que tout homme, à commencer par les plus faibles, est aimé de Dieu.
Ainsi, en marchant à la suite de Jésus, nous connaîtrons nous aussi des oppositions, des rejets. Mais le Seigneur rassure le prophète Jérémie : » ils te combattront, mais ils ne pourront rien contre toi, car je suis avec toi pour te délivrer. »
Nous pouvons nous aussi être tentés de vouloir limiter l’action de Dieu, de désirer qu’il fasse notre volonté. Or il nous appelle à sortir de nous-même à accueillir sa volonté. Jésus accueille lui aussi la volonté de son Père. Même au plus profond de la solitude et de l’abandon, à Gethsémani et au Calvaire, il s’en remet à son Père, certain qu’il ne l’abandonnera pas.
Déjà à Nazareth se profile la Pâques de Jésus. Il est menacé de mort par ses compatriotes. Mais il passe au milieu d’eux et poursuit son chemin comme il passera à travers la mort pour ressusciter au matin de Pâques.
Jésus nous appelle donc à suivre son chemin de vie, à nous convertir. Marcher à sa suite, être son disciple, c’est passer d’une attitude de repli et de possession à une ouverture de cœur et un abandon à sa volonté. C’est nous ouvrir à son amour. Comme nous y invite le message de grâce du prophète Isaïe. C’est nous laisser transformer par la charité qui donne sens à nos vies et qui l’emporte sur tout. Accueillons ce don de l’amour dans l’Eucharistie que nous célébrons.
Père Claude
Prieur du Bec