Pierre et Paul sont apôtres l’un comme l’autre, et pourtant très différents, le premier, pécheur de Galilée, le deuxième, Juif de Tarse, citoyen Romain ! Du côté de Dieu, l’Apôtre est choisi et envoyé par le Christ pour annoncer l’Evangile du Salut. Écoutons Jésus :
En Matthieu, il déclare aux Onze, avant de les quitter : Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc : de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit. (Mt 28, 18-19)
En Luc, dans les Actes des Apôtres : Vous allez recevoir une puissance, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. (Lc 1, 8)Envoyés par Dieu, Ses témoins, Ses porte-parole, il faut leur appliquer la parole de Jésus, dans l’évangile d’hier : Qui vous accueille m’accueille, et qui m’accueille accueille Celui qui m’a envoyé. (Mt 10, 40)
Du côté des hommes, nous pouvons nous référer aux paroles de Pierre, lors du choix de Matthias pour remplacer judas : Il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a marché à notre tête, à commencer par le baptême de Jean jusqu’au jour où il nous a été enlevé : il faut donc que l’un d’entre eux devienne avec nous témoin de sa résurrection. (Ac 1, 21-22)
Avoir été compagnon de Jésus et témoin de sa résurrection, voilà ce qui est requis de l’apôtre, ce qui l’habilite à sa mission de messager de la bonne nouvelle du Salut en Christ. Une autre parole mérite d’être citée, parce qu’elle précise la mission des Apôtres ; c’est celle, attribuée aux Douze, lors de l’institution des diacres : Il ne convient pas que nous délaissions la parole de Dieu pour le service des tables. Cherchez plutôt parmi vous, frères, sept hommes de bonne réputation, remplis d’Esprit et de sagesse, et nous les chargerons de cette fonction. Quant à nous, nous continuerons à assurer la prière et le service de la parole. (Ac 6, 2-4)
Partant de là, on peut considérer que l’apôtre a deux visages : il y a l’apôtre, le ministre, choisi et envoyé par l’Église, pour une mission spécifique, qui sera toujours celle de l’annonce de l’Évangile du Christ, un service, quelle que soit le champ de son ministère ; il y a l’apôtre qu’est tout chrétien, du fait de son baptême. Sous cet angle, le diacre lui-même est apôtre, puisqu’il est signe de l’amour du Christ pour tous, particulièrement les plus pauvres, les plus petits. Ce n’est pas dévaluer le titre, au contraire, puisque c’est lui donner toute son ampleur.
Chacun de nous doit se savoir appelé à marcher en compagnie du Christ, pour en devenir le témoin ; et le Christ nous rejoint sur tous nos chemins, même ceux qui s’écarteraient de la bonne direction ou iraient à contre sens. Pour tous, être apôtre est d’abord une question d’amour, car il ne s’agit pas de placer son savoir ou de faire la promotion d’une morale ; il s’agit de partager une foi qui nous a libérés et nous fait vivre.
Et puis, aussi important : on n’est pas apôtre à titre individuel ! C’est le Christ, toujours, qui appelle et envoie, le Christ, tête de l’Église qui est son corps. On ne s’improvise donc pas apôtre ; on ne se donne pas sa mission ; on s’inscrit dans la mission de l’Église et on en réfère à elle, car toute mission est un service, pas un pouvoir, un service partagé, complémentaire de celui des autres apôtres.
Nous sommes tous missionnaires, au service des autres, pas fonctionnaires pour faire tourner une institution ou entretenir une corporation de clercs ou de moines. A la place qui est la nôtre, ces remarques ont toute leur valeur, car si nous n’étions pas visage de l’amour de Dieu, signe de Son Salut en Christ, prophétie vivante du Son Royaume, et cela communautairement, notre existence n’aurait pas de sens et ne se justifierait pas. Heureux sommes-nous d’être associés à l’œuvre de Dieu en suivant, ici et maintenant, le Christ jusqu’à la croix !
Fr. Paul-Emmanuel
Abbé du bec
