Solennité du Christ Roi de l’univers – Jean (18, 33b-37)

Évangile« C’est toi-même qui dis que je suis roi »

En ce temps-là, Pilate appela Jésus et lui dit : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus lui demanda : « Dis-tu cela de toi-même, ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? » Pilate répondit : « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? » Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. » Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. »

Nous appartiendrons à la Vérité en marchant à la suite de Jésus. Le suivre, c'est prendre avec Lui le chemin de l'amour, de l'humilité et du service, en renonçant à nos passions, à nos désirs de posséder, à notre attachement aux biens terrestres, à notre soif de pouvoir et de domination.

Homélie :

La célébration du Christ, Roi de l’Univers, couronne l’année liturgique. Au commencement du monde, le Christ se trouvait auprès du Père. De même, à la fin des temps, il viendra juger les hommes et établir définitivement son règne, règne qu’il est venu annoncer en se faisant l’un de nous et qui se réalise tout au long de l’histoire.  » il remettra alors le royaume de Dieu à son père pour que Dieu soit tout en tous » selon l’affirmation de l’apôtre Paul (1, Co 13). Les lectures de cette fête nous dévoile différents aspects de cette royauté du Fils de Dieu.

La vision de Daniel nous découvre un « Fils d’Homme » – cette expression désigne un personnage éminemment saint et finalement s’appliquera à Jésus – qui s’avance humblement vers Dieu évoqué par le vieillard. Celui-ci accorde une royauté qui s’exprime en termes de « gloire » et de « domination », une royauté éternelle « qui ne sera pas détruite », s’étendant sur tous les peuples. Cette vision intemporelle annonce déjà la royauté éternelle que le Père confère à son Fils, cette gloire qui était la sienne « avant que le monde fut » et celle de son dernier avènement.

Cette vision contraste avec l’Évangile qui nous replace dans l’humilité de l’Incarnation. Plus encore, le moment choisi par Saint-Jean mettre en lumière la royauté de Jésus et celui de la Passion.

Jésus est accusé devant le pouvoir romain et ses ennemis espèrent qu’il sera condamné au supplice de la Croix. Pilate l’interroge en se moquant de lui : « Es-tu le roi des Juifs ? » caisse à laquelle Jésus réponds par une autre question : « Dis-tu cela de toi-même ou d’autres te l’ont-ils dit de moi ? » Et c’est Pilate qui doit se défendre d’être à l’origine de ce procès.

Jésus précise alors la nature de sa royauté. Elle n’est pas d’ordre politique. Il n’a pas d’armée pour le défendre et, contrairement à l’attente de beaucoup, il n’est pas venu rétablir le royaume d’Israël. Rappelons-nous qu’après la multiplication des pains, il a dû fuir la foule qui voulait le faire roi. Jésus déclare à Pilate : « Ma royauté ne vient pas de ce monde… Non, ma royauté ne vient pas d’ici. » Il vient établir le royaume de son père non par la grandeur et le pouvoir autoritaire, mais par l’humilité, l’offrande et le don de sa propre vie. Il se fait obéissant à son père, jusqu’à la mort sur la Croix.

Surpris par la réponse de Jésus, Pilate en tire cette conclusion sous forme de question : »Alors, tu es Roi ? » jésus précise aussitôt que sa royauté consiste à rendre témoignage à la vérité, c’est-à-dire à révéler aux hommes l’amour de son Père pour eux. Il vient établir à royaume de justice et de paix fondée sur l’amour, en demeurant dans les cœurs pour les transformer. Les hommes qui sont ouverts à l’amour accueillent le témoignage de Jésus est entrent ainsi dans le royaume de Dieu. Ce royaume échappe aux vicissitudes des royaumes temporels et des régimes politiques, soumis aux caprices de l’histoire et des passions humaines, car il est fondé sur le roc de la vérité et sur l’amour qui est un don de Dieu.

Jésus donne la preuve suprême de l’amour en offrant sa vie. « Parce qu’il s’est fait obéissant jusqu’à la mort, Dieu l’a exalté et lui a donné le nom qui est au-dessus tout nom, chantons-nous avec l’apôtre Paul (Phil, 2).

Cette royauté, ce pouvoir spirituel, lui est conféré par le Père qui le relève de la mort. Sa mort et sa résurrection sont un unique mystère. Sa gloire se manifeste déjà sur la croix d’où Jésus attire à lui tous les hommes.

Ce mystère Pascal auquel il nous fait participer est parfaitement exprimé dans l’Apocalypse de St Jean. Jésus nous a délivré par son sang. Il a fait de nous le royaume et les prêtres de Dieu son Père. Crucifié et transpercé, il a été glorifié par la résurrection. Il est l’Agneau immolé que nous avons chanté, il a reçu honneur, gloire et puissance. Il est le premier et le dernier éternellement avec son Père et il veut nous faire participer à sa royauté et à son sacerdoce.

Cette participation commence pour nous des cette vie. Le baptême nous fait prêtres, prophètes et rois, en nous communiquant la vie nouvelle jaillie de la Pâque du Seigneur. Nous sommes engagés sur un chemin de conversion. Nous sommes appelés à renouveler notre regard et notre jugement, notre comportement et nos actions. Sans doute sommes-nous prisonniers de considération propre humaine et temporelle sur le monde, les hommes, la société, la vie. Savons-nous reconnaître en Jésus celui qui doit régner sur nous et sur le monde ? Laissons-nous conduire par lui. Si nous posons jésus la question de Pilate : » alors, tu es Roi ? », l’Esprit de vérité peut faire surgir en au cœur cette confession de foi :  » oui, seigneur, viens régner en au cœur, fais-en nous ta demeure et conforme nos vies à ton amour. »

Nous appartiendrons à la Vérité en marchant à la suite de Jésus. Le suivre, c’est prendre avec Lui le chemin de l’amour, de l’humilité et du service, en renonçant à nos passions, à nos désirs de posséder, à notre attachement aux biens terrestres, à notre soif de pouvoir et de domination.

Laissons l’Esprit-Saint ouvrir nos cœurs à ceux qui nous entourent, aux petits, aux faibles, aux souffrants. Laissons-nous guider par la Vérité en vivant selon les exigences de la Parole de Dieu, en conformité avec l’Évangile. Tel est le témoignage que nous devons donner dans la société et le monde, un témoignage qui demande d’autant plus d’attachement au Christ qu’il faut souvent parler et agir à contre-courant des pressions de l’esprit du monde. Mais, ce n’est pas seuls que nous sommes appelés à vivre l’Évangile, c’est unis avec tous nos frères qui forment l’Eglise, le corps du Christ.

Ainsi, dans son Église humble et servante, à travers tous ses disciples qui conforment leur vie à son Evangile, Jésus peut, dès maintenant, établir son règne de vie et de vérité, de grâce et de sainteté, de justice, d’amour et de paix.

 

Père Claude
Prieur du Bec