Écouter une parole du Bec en 2023 – S22 – 28 mai

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Catégorie : Vie monastique

Dimanche de Pentecôte, 28 mai :

Le premier degré d’humilité consiste à demeurer en présence de Dieu et cette exhortation de saint Benoît, qui est une forme de prière continuelle, correspond bien à ce que l’Esprit-Saint réalise en nous : « Fuir absolument l’oubli, se remémorer sans cesse tout ce que Dieu a proposé, toutes ses bontés ».

Jésus a dit à ses disciples, à propos de l’Esprit-Saint : « Il vous rappellera tout ce que j’ai dit et fait au milieu de vous ». Ainsi, grâce au don de l’Esprit, nous pouvons relire l’œuvre de Dieu dans nos vies, comme dans celle de tous les hommes qui laissent Dieu agir en eux. Nous pouvons aussi reconnaître son action dans l’Église où Jésus est présent.  Ainsi, en revenant à la source, nous retrouverons le chemin de notre cœur.

L’humilité n’est donc pas un sentiment d’écrasement, de perte de notre identité. Au contraire, elle est reconnaissance de nos faiblesses que Dieu peut remplir de ses dons pour accomplir son œuvre. L’humilité permet donc l’action de grâce pour toute cette œuvre que le Seigneur ne cesse d’accomplir en nous et dans l’Église, comme au-delà même des limites de l’Église.Lundi 29 mai :

Ce premier degré d’humilité suppose une conversion, car il consiste à ne pas faire sa volonté propre, mais celle de Dieu. Il est le premier et le plus développé, car il commande tous les autres et pose les conditions nécessaires pour s’engager sur cette échelle. D’abord, fuir l’oubli, autrement dit toujours se souvenir de l’amour de Dieu pour nous ; ensuite entrer dans Sa volonté. Mais cette acceptation de la volonté de Dieu est freinée par notre attachement à notre volonté propre, à nos désirs égoïstes, car nous sommes toujours tentés de nous mettre au centre, de ramener tout à nous-mêmes.

Faire uniquement la volonté de Dieu, c’est la prière que nous Lui adressons plusieurs fois par jour dans le Notre Père : « Que ta volonté se fasse sur la terre comme elle est faite au ciel ». Nous Lui demandons en effet que ce soit Sa Volonté qu’Il fasse en nous, parce que suivre nos propres désirs, c’est courir vers la mort.

Aujourd’hui, en la fête de sainte Marie, Mère de l’Église, nous avons un exemple d’accueil de la volonté divine sur elle. A l’Annonciation, elle accueille la mission que Dieu lui confie ; au pied de la croix, elle offre son Fils et Jésus nous la donne pour Mère. Mère de l’Église, elle est Mère de tous ceux qui reconnaissent en Jésus le Seigneur et leur Sauveur.

Mardi 30 mai :

Dans tout ce premier degré d’humilité, saint Benoît nous adresse une mise en garde contre la voie de la facilité et de la satisfaction de nos désirs personnels : « Tourne le dos à tes volontés [..] Ne va pas après tes convoitises ». Là encore, il nous montre la voie à suivre, à choisir de faire la volonté de Dieu, car sans le renoncement à notre volonté propre, nous allons vers la mort.

Suivre le Christ, c’est choisir la vie, c’est se laisser conduire par l’Esprit-Saint. Et en ce temps de Pentecôte, il est bon de prolonger la lecture des textes de l’Écriture et notre méditation, car la Pentecôte n’est pas un point final au temps pascal, mais au contraire, un envoi, une ouverture au souffle de l’Esprit qui doit continuer à animer toute notre vie.

Mercredi 31 mai, fête de la Visitation :

« Je ne suis pas venu faire ma volonté, mais la volonté de Celui qui m’a envoyé » nous redit encore Jésus ce matin. Dans ce deuxième degré d’humilité, le renoncement à sa volonté propre, s’il était déjà exprimé tout au long du premier, est ici clairement affirmé. Mais ce renoncement ne relève pas seulement d’une ascèse, d’une discipline de vie, il nous renvoie à Jésus, le modèle qui doit continuellement nous inspirer. Ainsi, renoncer à notre volonté, c’est l’imiter, car lui-même à renoncé à la sienne pour accomplir celle de son Père qui l’a envoyé pour nous sauver et annoncer le Royaume selon le dessein divin.

C’est notre amour pour Lui qui nous pousse à l’imiter. Laissons-nous donc guider par l’Esprit-Saint comme pour Marie se mettant en route pour visiter sa cousine Élisabeth. Elle a toujours dit oui au Seigneur ; comme elle, soyons conscient de notre vocation à dire oui, que ce soit facile ou plus difficile.

Jeudi 1er juin :

« C’est le troisième degré d’humilité, qu’un homme, pour l’amour de Dieu, se place sous un supérieur en totale obéissance, imitant le Seigneur dont l’Apôtre dit : ‘’Il s’est fait obéissant jusqu’à la mort’’ (Ph. 2,8). » L’humilité se confond ici avec l’obéissance qui est l’un des trois vœux émis lors de notre profession : obéissance à la Règle, obéissance à l’abbé comme au Christ.

Vue de l’extérieur, sans le regard de la foi, l’obéissance pourrait être considérée comme aliénante de notre liberté, comme mutilation de notre personnalité. C’est vrai que si l’obéissance n’est pas consentie par le candidat à la vie religieuse, elle devient alors un fardeau insupportable.

Dans ce texte, très bref, deux expressions sont fondamentales :

1/ « Pour l’amour de Dieu » et 2/ « Imitant le Seigneur ».

Notre obéissance est vécue par amour. Elle doit être le choix libre et réfléchi d’offrir sa vie pour le Seigneur. En ce sens elle est paradoxalement libératrice et épanouissante car l’amour dilate toujours le cœur au lieu de le rétrécir. Enfin, le Christ est notre maître et notre guide. Librement, Il s’est fait obéissant par amour de son Père et de nous tous, puisqu’Il a donné sa vie pour nous libérer du péché et nous la donner en plénitude. Par l’obéissance à sa volonté, à travers les médiations qui nous sont proposées, nous marchons à sa suite pour vivre avec Lui et avec le Père.

C’est bien le choix qu’ont fait tous les martyrs que nous commémorons, comme saint Justin aujourd’hui. Ils ont choisi de servir le Dieu vivant jusqu’à mourir pour Lui plutôt que de le renier pour une existence éphémère et sans gloire.

Vendredi 2 juin :

Comme le troisième degré montrait le lien de l’humilité avec l’obéissance, le quatrième degré montre qu’il existe aussi un lien très fort entre l’humilité et la patience, celle-ci étant d’ailleurs le prolongement de l’obéissance. Et autant le troisième degré exprimait ce lien de façon sobre et concise, autant le quatrième degré le développe par un long florilège de citations bibliques empruntées aux psaumes, à l’Évangile ou à l’apôtre. A travers ce tissu de citations de l’Écriture, c’est la patience de Dieu qui apparait autant que celle du Christ qui a vécu les situations douloureuses évoquées dans ces textes.

Et comme dans le degré précédent, c’est l’amour qui donne sens et lumière à la patience vécue pour Dieu. « En tout cela, nous remportons la victoire, à cause de Celui qui nous a aimés ». Dieu nous aime puisqu’Il nous a envoyé le Christ qui a donné sa vie par amour pour nous ; Il est patient et attend en retour notre réponse d’amour pour Lui.

Samedi 3 :

Ce cinquième degré d’humilité touche l’ouverture du cœur. Déjà, dans le chapitre 4 sur les instruments des Bonnes Œuvres, saint Benoît recommandait de découvrir au père spirituel les mauvaises pensées qui viennent au cœur pour les détruire contre le Christ.

Il faut remarquer que notre cœur est mélangé avec toutes sortes de pensées qui nous viennent. Il est habité par le désir de suivre le Christ, de nous donner à Lui, mais aussi par des pensées mauvaises, par le péché. Nous voulons le bien de nos frères mais, si nous nous sentons lésés, traités injustement, nous aurons de la jalousie ou de la rancœur pour tel ou tel. Et nous savons pouvoir trouver plein d’autres pensées inavouables ! Il faut alors les laisser remonter pour les identifier et les découvrir au père spirituel pour nous en libérer et revenir à la vie. Les laisser dans notre cœur nous ferait perdre la sérénité et la paix, alors que les regarder et les avouer au Seigneur, comme le recommande le psaume cité par saint Benoît : « Je dénoncerai mes injustices au Seigneur, contre moi ; et toi, tu as pardonné l’impiété de mon cœur. » (Ps. 32, 5) nous permet de renouer alliance avec le Christ et marcher à sa suite.

 

Frère Claude
Prieur du Bec

Humilité