LXIII. DES RANGS DANS LA COMMUNAUTÉ.
Dimanche 18 décembre :
Si, au début de ce chapitre, saint Benoît donne à l’abbé la possibilité de décider des places dans la communauté, par la suite il n’est question que de garder l’ordre d’entrée au monastère. L’abbé doit se montrer juste dans ses décisions, car le respect de garder sa place dans les rangs fait partie des usages et facilite la vie commune.
Ce soir nous chanterons l’antienne ‘’O Adonaï’’, ‘’O Seigneur, chef de la Maison d’Israël’’. Ce chef est le berger qui conduit son troupeau, qui le garde, le protège et le conduit par le bon chemin. Chef du peuple, il doit pour cela lui enseigner la Loi divine et le nourrir de la parole de Dieu. C’est ce que fait Moïse dans son rôle de chef du troupeau que Dieu lui a confié. Il reçoit la Loi et la transmet au peuple. Suivre le bon chemin, c’est mettre en pratique la Loi divine.
Lundi 19 décembre :
Le respect que les moines doivent avoir les uns pour les autres pourrait relever de simples règles sociales qui sont une des conditions de la vie en toute société. Saint Benoît voit autrement car, pour lui, il y a plus en nous faisant reconnaître le Christ présent en chacun de nous : les plus jeunes dans les anciens, en raison de la sagesse qu’ils ont acquise au cours de longues années de vie monastique ; les anciens envers les jeunes pour les encourager, les aider dans cette même vie monastique.
Nous sommes réunis au nom du Christ après notre engagement à sa suite et Il établit sa demeure en chacun de nous. Autant de raisons qui font qu’en se respectant mutuellement, c’est Lui que nous honorons.
LXIV. DE L’ORDINATION DE L’ABBÉ.
Mardi 20 décembre, ‘’O Clavis David’’ :
Cette quatrième antienne des Grandes ‘’O’’ : O Clé de David, voit dans le Christ le Roi de l’avenir, le Messie attendu qui est le Seigneur, Maître de la vie et de la mort. Le livre de l’Apocalypse reprend le texte d’Isaïe, en voyant dans ce maître de maison qui détient les clés du palais royal, le Christ ressuscité, descendu aux Enfers pour en faire sortir les captifs de la mort.
Telle sera la mission du Christ annoncé par les prophètes, attendu par Israël et accueilli par Marie qui, dans la foi, a ouvert son cœur à la parole de l’ange. Nous sommes, nous aussi, appelés à ouvrir nos cœurs à la venue du Fils de Dieu, ou mieux, à le laisser ouvrir la porte de notre cœur pour qu’il puisse établir en nous sa demeure. C’est pour cela qu’il vient à Noël : « Il a planté sa tente parmi nous », dit le Prologue de Jean que nous lirons à la messe du jour de Noël.
Tournons-nous vers Lui par une conversion sincère comme nous y invite, en ce temps de l’Avent, la prédication des prophètes d’Isaïe à Jean-Baptiste, afin qu’Il transforme nos vies.
Mercredi 21 décembre :
Saint Benoît donne ici un portrait de l’abbé, et on pourrait dire celui de l’abbé idéal. Ce portrait est certainement nourri de sa propre expérience. L’abbé doit sans cesse trouver un équilibre entre l’attention aux frères, qui sont tous forcément très différents, et le souci de les entrainer à marcher, selon la Règle, à la suite du Christ. Saint Benoît le voit comme un serviteur que le maître a établi sur sa maison pour donner à chacun la nourriture de la Parole de Dieu.
Le serviteur par excellence, celui qui est le modèle de l’abbé, c’est Jésus lui-même qui est évoqué par Isaïe dans les quatre poèmes du Serviteur du Seigneur et dont saint Benoît reprend une expression à propos de l’abbé : « Qu’il se défie toujours de sa propre fragilité, et se souvienne qu’on ne doit pas broyer le roseau cassé ». Et toujours, dans ce chapitre comme en d’autres, saint Benoît rappelle qu’il faut agir avec mesure. L’abbé doit donc corriger avec prudence et montrer constamment une grande miséricorde envers les frères. Cette miséricorde a sa source en Jésus qui vient parmi nous pour relever l’homme déchu et l’introduire dans la lumière.
Nous chantons aujourd’hui l’antienne des Grandes O : ‘’O Oriens’’ ; « O Aurore, splendeur de la lumière éternelle et soleil de justice, viens et illumine ceux qui sont assis dans les ténèbres et l’ombre de la mort ».
LXV. DU PRIEUR DE MONASTÈRE.
Jeudi 22 décembre :
La série des sept Grandes Antiennes ‘’O’’ annonce la venue de Jésus sous différents aspects avec autant de traits de son identité et de son rôle dans l’histoire du salut.
La première, O Sapientia, qui fait référence à la Création, évoque l’origine éternelle de celui qui vient. La deuxième évoque Moïse, le libérateur de son peuple, et le don de la Loi. Les troisième et quatrième voient en Lui le Messie royal avec la référence à Jessé et à David. Les trois dernières : ‘’Soleil levant’’, ‘’Roi des nations’’ et ‘’Emmanuel’’, se réfèrent davantage aux prophètes comme Malachie, Isaïe et Jérémie.
Dans celle d’aujourd’hui, ‘’O Rex gentium’’, ‘’O Roi des nations’’, le Christ est présenté comme la pierre angulaire soutenant l’édifice, et qui aussi est le point de jonction entre les deux murs, entre deux mondes séparés, entre juifs et païens.
En prenant notre chair, le limon dont nous sommes pétris et qu’il a laissée crucifier, Jésus réconcilie en Lui et avec Dieu, Israël et les païens. Des deux, il fait en sa personne un homme nouveau, une seule nation sainte. C’est grâce à notre foi en Lui qu’Il peut faire de nous des pierres solides pour l’édification de son Église, comme avec nos fragilités et nos limites, et toutes nos pauvretés qu’il en fait un peuple de croyants animés par son Esprit.
Vendredi 23 décembre :
La dernière des Grandes Antiennes, ‘’O Emmanuel’’, chante l’accomplissement de la prophétie d’Isaïe contenue dans ce qu’on appelle ‘’le petit livre de l’Emmanuel’’ (Is. 6 à 11). Le Messie royal annoncé au ch. 7 est le petit enfant chanté à Noël : « Un enfant nous est né, un fils nous est donné… (Is. 9) ». C’est sous ce même nom qu’il est annoncé à Joseph dans l’évangile de saint Matthieu (Mt. 23). Il est ‘’Dieu avec nous’’.
On retrouve souvent cette expression : « Le Seigneur est avec nous » ou « Le Seigneur est avec toi », dans la Bible, mais aussi dans l’Évangile : « Le Seigneur est avec toi » dit l’ange à Marie (Luc 1, 28), comme aussi dans la liturgie, lorsque le prêtre salut la foule au début de la messe : « Le Seigneur soit avec vous ». C’est en Jésus que le Seigneur fait alliance avec nous, une alliance définitive conclue avec tous les hommes.
Et la fête de Noël nous rappelle cette réalité que Dieu répond à notre attente puisqu’Il est le Seigneur de l’espérance et le salut des nations. Nous portons aussi en ces jours l’attente de beaucoup, car nombreux sont ceux qui vivent des situations de souffrance, de détresse, de solitude, de maladie et de bien d’autres épreuves. Avec eux et pour eux, nous supplions : « Viens nous sauver, Seigneur notre Dieu ».
LXVI. DES PORTIERS DU MONASTÈRE.
Samedi 24 décembre :
En cette veillée de Noël, nous terminons la lecture des Évangiles de l’enfance qui précèdent le récit de la naissance de Jésus. L’Évangile d’aujourd’hui est le chant du Benedictus, le cantique prophétique et d’action de grâce de Zacharie dont il est dit qu’il fut rempli de l’Esprit-Saint. C’est bien le signe qu’il est, lui aussi, inspiré par Dieu. Cette remarque se rencontre souvent dans l’Évangile de Luc.
Inspiré par le Saint-Esprit, Zacharie se met à louer Dieu. Le Seigneur vient de lui ouvrir les lèvres comme nous le Lui demandons, nous aussi, chaque matin, au début des Laudes, pour Le louer : « Seigneur ouvre mes lèvres et nous proclamerons ta louange ».
Le cantique de Zacharie est un cantique prophétique qui dépasse la simple naissance de Jean. Et de façon voilée, c’est le Christ qui y est ainsi annoncé. Cette force salvatrice dans la maison de David, c’est le Messie, c’est Jésus Sauveur qui vient donner la paix à son peuple.
La seconde partie du texte évoque Jean-Baptiste et sa mission de prophète ; il vient préparer le chemin du Seigneur, tourner le peuple vers l’astre d’en haut. Jean est entièrement tendu vers le Christ dont nous allons célébrer la venue au monde. Soyons prêts nous aussi à accueillir notre Sauveur qui pauvre et faible, vient à nous dans nos pauvretés et nos faiblesses pour faire germer en chacun de nous la vie vraie et l’espérance sainte.