Écouter une parole du Bec en 2022 – S48

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Catégorie : Vie monastique

XLVIII. DU TRAVAIL MANUEL QUOTIDIEN.

Dimanche 27 novembre, premier dimanche de l’Avent :

Aujourd’hui commence donc une nouvelle année liturgique. Lorsqu’on dit ‘’liturgique’’, on pense bien sûr à la célébration des mystères du Seigneur qui vont se déployer pendant toute cette année, avec la fête de Noël, puis la montée vers les célébrations pascales : Passion, mort et Résurrection du Seigneur. En fait, c’est toute l’année qui est une célébration pascale avec les dimanches qui commémorent tous la Résurrection.

Mais pour être vécue en vérité, la liturgie doit s’accompagner d’un renouvellement intérieur, personnel et communautaire. C’est le moment de prendre un nouvel élan et de vérifier nos engagements dans les domaines constituant notre vie quotidienne : la fidélité à l’office, à la lectio divina, à la prière, notre sérieux dans le travail et dans nos services, notre dévouement à nos frères et au prochain, et la lutte contre l’individualisme… Autant d’aspects de notre vie sur lesquels nous devons être vigilants. La vigilance, c’est précisément ce qui nous est rappelé dans la liturgie d’aujourd’hui.

Et ce chapitre 48 sur le travail nous rappelle qu’il nous faut concilier ces différents domaines de notre vie : travail, lecture, silence, offices, avec toujours cette mention pascale, comme souvent rappelée chez saint Benoît : la sanctification du temps, que ce soit dans la journée et la nuit, dans la semaine ou pendant toute l’année.Lundi 28 novembre :

Dans cette seconde partie du chapitre sur le travail manuel quotidien, il est autant question du travail manuel que de la lecture. C’est qu’après les offices et la prière, ces deux éléments sont constitutifs de nos vies chrétiennes, et les deux alternent dans la journée, encadrés par les offices.

Ici, il est question du Carême, temps pendant lequel il est donné plus d’importance à la lecture. Et le livre à lire, en entier et dans l’ordre, signifie qu’il nous faut éviter la dispersion si l’on veut nourrir son esprit et son cœur.

Cette lecture est centrée sur la Parole de Dieu et ce qui en favorise l’intelligence et la compréhension. Elle permet de nous rapprocher de Dieu, de revenir à Lui en menant une véritable conversion. Et ce qui est dit pour le Carême peut être étendu au temps de l’Avent.

 

Mardi 29 novembre :

La fin de ce chapitre sue le travail manuel est consacrée au dimanche, jour marqué par l’absence de travail manuel, sinon pour les nécessités du service communautaire.

Il a déjà été question du dimanche dans de précédents chapitres, aussi saint Benoît se contente-t-il ici de rappeler que ce jour est consacré à la lecture. C’est le jour du Seigneur, de sa Résurrection, c’est le pilier de la vie monastique qui commence le samedi soir aux Vêpres, pour se terminer le lendemain avec les Complies.

Mais en même temps, saint Benoît connaît la faiblesse des frères et il sait que tous ne peuvent vivre de la même façon, aussi il a le souci des plus faibles. Par sa compassion, il honore lui-même le Seigneur et on sait combien la compassion est un don de l’Esprit-Saint. Qu’on se souvienne des guérisons opérées par Jésus le jour du sabbat ! Mais il est important que les plus fragiles, les mal portants, les malades ou les frères très âgés, puissent célébrer le Jour du Seigneur par des occupations qui leur soient adaptées et qui tiennent compte de leurs limites. Et si leur cas les oblige à ne rien pouvoir faire, ils peuvent toujours s’offrir au Seigneur en offrant leur situation.

Que ce temps de l’Avent, et pas seulement les dimanches, nous permette d’entrer plus profondément dans la contemplation de la célébration des mystères du salut.

 

XLIX. DE L’OBSERVANCE DU CARÊME.

Mercredi 30 novembre :

Comme nous lisons la Règle trois fois par an, ce chapitre sur l’observance du Carême arrive aussi au début de l’Avent. C’est pour nous rappeler que ce temps est important, le temps de préparation à l’un des grands mystères que nous célébrons, le mystère de l’Incarnation. D’ailleurs, à certaines époques, l’Avent était appelé le ‘’ Petit Carême ’’, et c’était l’occasion de sermons donnés par des prédicateurs célèbres, comme pour le Carême.

Saint Benoît lui-même dit au début du chapitre « qu’en tout temps, la vie d’un moine doit présenter une observance de carême ». C’est donc pour nous une invitation à intérioriser l’attente de la venue du Messie, à ne pas rester à l’extérieur du mystère comme tout ce qui entoure la fête de Noël dans notre société sécularisée actuelle, tous ces aspects culturels si sentimentaux soient-ils. Mais c’est le temps d’une vraie conversion profonde, celle à laquelle nous appellent les prophètes, et particulièrement Jean-Baptiste si présent en ce temps de l’Avent. C’est aussi le temps d’entrer plus profondément dans la Parole de Dieu, entendue dans la liturgie, lue et méditée dans le silence. C’est le moment d’ouvrir nos yeux et notre cœur à notre prochain, à ceux qui peinent et qui sont dans l’épreuve : « Portez les fardeaux les uns des autres » nous rappelle saint Paul. Et le prochain sera celui dont nous nous ferons proche, en qui nous reconnaissons le Christ.

 

  1. DES FRÈRES QUI TRAVAILLENT LOIN DE L’ORATOIRE OU SONT EN VOYAGE.

Jeudi 1er décembre :

Ici encore, saint Benoît tient compte des réalités matérielles. On voit que déjà, en son temps, les frères pouvaient être amenés à travailler loin du monastère ou à voyager. Dans la mesure où ces ‘’sorties’’ ont un motif sérieux et où le moine en réfère à l’abbé, et reste donc dans l’obéissance, il n’y a pas de contradiction avec la stabilité, car on appartient toujours à la communauté et ces sorties peuvent, dans bien des cas, en avoir son service comme objectif. Au contraire, une sortie ‘’clandestine’’ poserait question !

La stabilité, autrement dit la continuité du lien avec la communauté, nous engage toujours vis-à-vis de celle-ci. C’est pourquoi il est recommandé de rester uni à elle par les offices, en les célébrant « comme ils pourront », nous dit saint Benoît. Sur ce point encore, il reste souple, car l’essentiel est de rester fidèle à son engagement, tout en restant en communion avec les frères.

 

  1. DES FRÈRES QUI NE VONT PAS TRÈS LOIN.

Vendredi 2 décembre :

Ce bref chapitre renvoie à l’un des récits de saint Grégoire le Grand, au chapitre XII de ses Dialogues, ‘’le repas clandestin’’, ou deux frères, sortis pour une affaire qui les a retenus assez tard, se rendent chez une pieuse femme des environs et prennent le repas chez elle. La scène est représentée dans le grand cloître de l’abbaye de Mont-Olivet où l’on voit les deux moines attablés, servis par trois femmes dont l’une leur sert du vin et les deux autres apportent des plats.

De retour au monastère tardivement, ils demandent la bénédiction à l’abbé qui leur demande où ils ont mangé. Ils répondent par un mensonge. Mais Benoît les confond en leur décrivant le menu qu’ils ont pris et le nombre de coupes qu’ils ont bues. Ils avouent alors leur faute et obtiennent le pardon.

Cette scène est l’illustration de ce chapitre et rappelle la Règle avec sa mise en garde : si une sortie se fait sans la permission de l’abbé, y compris un repas, on risque de ne plus voir où sont les limites de ce qui est permis ou défendu. On entretient le flou et on se fait sa propre règle qui peut s’écarter de la Règle commune. On retrouve ici la question de l’excommunication, car en prenant trop de libertés, on s’excommunie soi-même en prenant des distances par rapport à la communauté.

C’est pourquoi nous avons toujours besoin d’être au clair dans ce domaine ; l’obéissance étant une garantie de liberté et non un esclavage.

 

LII. DE L’ORATOIRE DU MONASTÈRE.

Samedi 3 décembre :

Saint Benoît nous dit, dès le début de ce chapitre, que : « L’oratoire doit être ce que dit son nom, c’est le lieu de la prière ». L’oratoire, comme toutes nos églises chrétiennes est, dans la Bible, l’héritier du Temple de Jérusalem, lui-même l’héritier de la Tente du Rendez-vous qui accompagnait les Hébreux dans leur marche dans le désert.

La Tente du Rendez-vous avait deux fonctions : elle était le lieu de la Présence divine, manifestée par la nuée pendant le jour et par une colonne de feu durant la nuit, et où la Gloire de Dieu reposait comme dans le Temple de Salomon. Saint Benoît dit la même chose à propos de l’oratoire : « Une fois accomplie l’œuvre de Dieu, que tous sortent dans le plus grand silence, et que la Gloire de Dieu emplisse le lieu ».

L’autre fonction de la Tente du Rendez-vous était d’être, comme son nom l’indique, le lieu de la rencontre entre Dieu et l’homme. Lieu de la prière, l’oratoire est aussi celui où sont célébrés l’Opus Dei, c’est-à-dire les offices divins, l’eucharistie (l’action de grâce). C’est aussi le lieu où nous nous sommes engagés à suivre le Christ par notre profession monastique, celui où se construit la communauté quand nous y sommes rassemblés pour les offices divins, car c’est le moment privilégié où l’on sait que le Christ est au milieu de nous.

Tout cela doit rester présent à notre esprit lorsque, en communauté ou en privé et dans le silence, nous entrons dans l’oratoire. Et ce silence et la paix qu’ils dégagent doivent frapper tous ceux qui veulent y entrer.