Dimanche de Pentecôte, 5 juin :
Parmi les dons de l’Esprit-Saint énumérés par saint Paul, figure le don de l’humilité à côté des autres dons que sont la paix, la joie, la bienveillance… Tous ces dons vont ensemble, car on ne construit pas la paix avec l’orgueil ou par ostentation, sinon, on aggrave le conflit. On ne donne pas pour se montrer, sinon notre charité est d’abord amour de soi-même et non de l’autre.
En cette fête de Pentecôte, demandons à l’Esprit-Saint de répandre ses dons sur nous et sur tous les disciples de Jésus.Lundi 6 juin :
Un des aspects de l’humilité est de se décentrer de soi-même, de ne pas se croire le centre du monde, ou tout au moins de la communauté, mais d’accepter d’être un parmi d’autres. Cela ne signifie pas que personne n’aura un regard pour moi, mais que nous aurons tous de l’attention les uns pour les autres.
Et puis, nous sommes dans une communauté qui a déjà une histoire, son histoire, et tout un passé avec ses traditions, ses usages… Elle n’a pas commencé avec moi ! Il y a sans doute des pratiques, des usages à revoir, à rectifier, car la tradition ne doit pas être figée, car au contraire, elle doit rester vivante. Mais nous ne rentrons pas dans une communauté avec une vocation de réformateur ! Il nous faut d’abord respecter ceux qui nous précèdent, les frères plus anciens qui ont acquis une sagesse et une fidélité, même s’ils n’ont pas la prétention, eux aussi, d’être parfaits. Nous sommes tous en chemin pour avancer ensemble.
Ce temps de l’après Pentecôte nous rappelle la condition de l’Église pérégrinante qui marche à la suite du Ressuscité et qui est animée par le souffle de l’Esprit-Saint.
Mardi 7 juin :
Ce neuvième degré d’humilité rejoint le chapitre 6 de la Règle sur le silence, tout comme les premiers degrés rejoignent le chapitre 5 sur l’obéissance.
Silence, obéissance, humilité ne peuvent se séparer ; ils constituent le terrain sur lequel peut croître notre relation à Dieu. Certes, c’est jour après jour, et au fil des années, que nous progressons dans cette relation. Nous nous laissons façonner par le Seigneur comme de l’argile dans la main du potier, pour reprendre une comparaison biblique.
Nous avons donc à veiller sur le climat de silence qui est l’objet de ce neuvième degré d’humilité. Saint Benoît dit ailleurs que les moines doivent être jaloux de leur silence (chap. 42). Si le cœur est agité, troublé par les excès de paroles, de conversations – par toujours utiles, reconnaissons-le – il devient difficile d’écouter la Parole de Dieu et de discerner ses appels. Le silence favorise la paix, alors que l’excès de paroles risque de provoquer des heurts, des dissensions et de blesser les personnes.
Rappelons-nous encore les fruits de l’Esprit-Saint énumérés par l’apôtre Paul, ces qualités qui sont inséparables : paix, bonté, humilité et les autres. Tout cela se retrouve dans la Règle qui, nous l’avons souvent dit, s’inspire de la Parole de Dieu.
Mercredi 8 juin :
On pourrait épiloguer sur ce dixième degré d’humilité, le plus bref des douze, et on pourrait aussi se demander de quel rire saint Benoît veut parler. C’est sans doute le rire lourd et vulgaire, le rire superficiel qui touche à la dérision, à la moquerie et qui traduit souvent un manque d’intériorité !
Saint Benoît veut-il dire que l’humilité doit être une vertu triste ? Faut-il avoir un visage fermé, renfrogné ? Faut-il toujours être un moine grave et austère ? Sans doute pas, car il faut aussi des moments de détente, de joie partagée.
L’humilité n’est pas incompatible avec la joie rayonnante ; au contraire. Et en ce temps de Pentecôte, rappelons-nous encore les fruits de l’Esprit-Saint énumérés par saint Paul dans Galates 5, 22 où la joie vient aussitôt après la charité, et la charité doit être humble si l’on se réfère à sa première Epitre aux Corinthiens (Cor. 13, 4).
Saint Benoît nous invite donc à rechercher la vraie joie qui vient de l’Esprit-Saint ; cette joie qui dilate le cœur, qui rayonne chez celui dont la vie est unifiée ; c’est la vraie joie donnée par le Ressuscité. Nous chantons en Carême, avec les mots mêmes de saint Benoît : « Dans la joie de l’Esprit, attendons la Sainte Pâque ». La vraie joie vient du don total de sa vie, de son cœur, de sa volonté, à la suite du Christ qui a tout donné dans l’offrande totale de sa vie pour nous.
Jeudi 9 juin :
Ce onzième degré d’humilité fait suite aux deux précédents et s’en rapproche : éviter l’excès de paroles et demeurer en silence ; éviter le rire trop facile, parler avec sagesse et gravité.
On a déjà dit combien le silence favorise l’écoute de la Parole de Dieu qui doit, elle-même, inspirer nos propres paroles. Si celles-ci sont l’expression de la Paroles de Dieu, elles deviendront à leurs tours édifiantes, non pas dans le sens légèrement péjoratif où on entend parfois ce mot, mais dans un sens constructif, car elles doivent être utiles pour celui à qui elles s’adressent. Elles ne doivent donc pas se perdre dans des excès de bavardage.
En faisant mémoire aujourd’hui de saint Ephrem, nous avons l’exemple d’un passionné de la Parole de Dieu qu’il a méditée, commentée en se laissant guider par l’Esprit-Saint.
Vendredi 10 juin :
Avec le douzième degré, nous arrivons en haut de l’échelle de l’humilité. Cette succession de degrés ou d’échelons ne signifie pas que nous devons les pratiquer les uns après les autres, dans un ordre chronologique ; ils sont à prendre comme les différents aspects de l’humilité, complémentaires et nécessaires.
Nous remarquons bien qu’ils tendent à nous configurer au Christ : ‘’Jésus doux et humble de cœur’’ et surtout ‘’Jésus qui n’a pas retenu le rang qui l’égalait à Dieu et qui s’est abaissé jusqu’à la mort de la croix’’ ; Jésus qui a pris sur lui nos souffrances et nos maladies pour nous faire partager en retour sa vie nouvelle et la gloire de sa résurrection. L’humilité nous fait entrer dans le mystère pascal de Jésus.
Et à la fin, c’est tout notre être, toute notre vie, qui sont façonnés par l’humilité. Pourtant, nous savons bien par expérience que nous ne sommes jamais parvenus au sommet de l’échelle, mais que nous y tendons.
Aussi la pratique de l’humilité, patiente et persévérante, nous fait parvenir progressivement à la charité, cet amour qui, nous dit saint Jean, chasse la crainte et fait demeurer en nous les personnes divines.
CHAPITRE 8 : DES OFFICES DIVINS LA NUIT.
Samedi 11 juin :
La série de chapitres sur l’office divin commence par traiter des offices nocturnes. C’est une façon de souligner le caractère pascal des offices et de toute la vie du moine.
Les vigiles nocturnes rappellent en effet la Vigile pascale, la nuit de la Résurrection du Seigneur. L’office de nuit étant le premier office de la journée, il nous rappelle que la prière liturgique est une célébration pascale. La vie du moine annonce déjà la vie future, la vie nouvelle inaugurée par Jésus ressuscité.
Ce caractère pascal est encore marqué par le fait que les matines (pour nous les Laudes), doivent se dire au point du jour. Ainsi, toute la journée se vit alors dans la lumière pascale. Tout ce que nous faisons est alors pris dans l’action de grâce, pour la Gloire de Dieu.