Paroles de la salle du Chapitre – S52

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Catégorie : Vie monastique

Dimanche 26 décembre :

     « Lorsqu’on commande à un frère des choses difficiles ou impossibles » (chapitre 68), saint Benoît lui recommande d’accepter l’ordre « en toute douceur et obéissance ». Et c’est alors qu’il peut demander à son supérieur de réexaminer cet ordre « si le poids du fardeau excède tout à fait la mesure de ses forces ».

Il peut en effet y avoir des demandes, de la part d’un supérieur, qui soient trop lourdes. Un discernement est nécessaire dans le calme, la réflexion et la prière. Seul, on ne peut pas forcément voir les conséquences d’un ordre : ou l’incapacité réelle pour l’exécuter, ou le bien qui, au contraire, en résultera. C’est pourquoi un dialogue est nécessaire et le supérieur pourra donner son avis, éclairé par l’Esprit-Saint.

On ne comprend pas toujours le sens, ou la finalité, de telle ou telle demande, dans telle ou telle situation. On en a un exemple dans l’Évangile d’aujourd’hui (Luc 2, 41-52) où l’on voit que Marie et Joseph n’ont pas compris le sens de la situation venant d’un ordre divin. Mais en y obéissant, ils sont entrés dans le plan de Dieu ; ils ont servi la future mission de Jésus qui était déjà annoncée dans son enfance.

 Lundi 27 décembre :

Chapitre 69 : « Que nul dans le monastère ne se permette d’en défendre un autre ». L’interdiction dans le monastère de « défendre ou de protéger un moine, même si on lui est uni par un lien de parenté », nous semble aller de soi, car ce peut être la cause de graves divisions dans une communauté. Il risque alors de se former des partis ou des groupes opposés. On a vu dans l’Église, et même à sa tête, ce genre de situations. Il y a eu des époques où les papes étaient issus de grandes familles romaines rivales, et c’était ces familles qui pratiquement gouvernaient l’Église au prix de luttes acharnées. Il a fallu des mouvements de réformes pour s’arracher à cette emprise.

En cas de conflits, il faut l’avis d’un tiers extérieur pour juger avec objectivité ces situations et essayer d’y remédier. Et puis, de part notre profession monastique, nous sommes voués au Christ, et c’est donc à lui qu’il faut s’en remettre, car c’est lui qui fait notre unité. Étant unis à lui, nous sommes alors unis entre nous ; étant un juge plein de miséricorde, c’est à lui que nous devons confier tous nos soucis et nos tensions pour qu’il puisse les apaiser.

 

Mardi 28 décembre :

Ce chapitre 70, sur ceux qui se permettent d’en frapper d’autres, fait suite au précédent. Saint Benoît met en garde contre le risque de se prendre pour un justicier, un redresseur de torts, et à plus forte raison, d’utiliser les moyens extrêmes que sont l’excommunication et la peine des coups sans discernement. Ces châtiments ne sont appliqués qu’en dernier recours, et encore ne le sont-ils que par l’abbé qui ne les emploiera qu’après avoir utilisé tous les moyens de douceur et de patience.

Saint Benoît voit dans cette attitude une affirmation de soi-même et d’un pouvoir personnel, donc un risque d’orgueil. Il rappelle à chacun la nécessité de l’humilité, condition indispensable si l’on doit corriger un frère. Humilité et charité sont la manière évangélique d’aider celui qui est en difficulté.

 

Mercredi 29 décembre, fête de saint Thomas Becket :

     En ces derniers chapitres de la Règle, saint Benoît reprend les thèmes qu’il avait abordés au début. C’est le cas de l’obéissance, annoncée dans le Prologue : « revenir par le labeur de l’obéissance à Celui dont t’avait éloigné la lâcheté de la désobéissance. » On la retrouve aussi aux chapitres 5 et 7.

Plus que la perspective du châtiment qui menace celui qui s’enferme dans une obstination orgueilleuse, il faut considérer la libération que procure l’humble obéissance qui a pour modèle celle du Christ, le Fils bien aimé, et qui n’est pas une obéissance d’esclave, mais une obéissance à la fois filiale et fraternelle. Car l’obéissance à la Règle va à Dieu, mais elle est aussi fraternelle puisque, inspirée par la charité, les frères s’obéiront les uns aux autres. Elle comporte le renoncement à sa volonté propre. Et ce temps de Noël nous rappelle la valeur de l’obéissance car, au-delà de sa petite enfance, nous voyons en Jésus, le Fils du Père qui vient dans le monde pour faire la volonté de celui-ci et non la sienne. Aujourd’hui, nous voyons comment saint Thomas Becket a payé de sa vie son choix d’obéir à Dieu plutôt qu’au pouvoir politique !

 

Jeudi 30 décembre :

Dans cet avant-dernier chapitre sur le « bon zèle que doivent avoir les frères », saint Benoît propose un bouquet final de conseils où les moines doivent se laisser brûler par le feu de l’amour. Qu’ils s’acceptent les uns les autres tels qu’ils sont et s’oublient eux-mêmes pour être attentifs à leurs frères.

Amour de Dieu et amour du prochain sont liés. Et par-dessus tout, ne rien préférer à l’amour du Christ, car il est notre guide unique, notre maître, celui qui nous conduit vers son Père et le nôtre. Nous ne faisons pas notre salut chacun pour soi ; nous avançons en communauté, et le souci des autres doit toujours prévaloir sur mon intérêt personnel ! C’est en aimant, en partageant, en donnant aux autres que nous avancerons ensemble vers le Royaume de Dieu.

 

Vendredi 31 décembre :

Encore une fois, nous arrivons au dernier chapitre de la Règle que saint Benoît considère comme un moyen parmi d’autres pour tendre à la perfection comme il le dit lui-même. Elle est écrite pour des débutants, mais pour qui la suit, elle est un moyen sûr pour parvenir aux « sommets de vertu et de contemplation. »

Elle propose un chemin évangélique pour marcher à la suite du Christ, car c’est toujours lui qui est notre idéal et notre guide. Ce chemin peut paraitre escarpé, mais il sait s’adapter à chacun et il est ouvert à tous, moines, religieux comme laïcs, car nous sommes toujours des débutants. Saint Benoît est un maitre attentif et proche de chacun. Il comprend les personnes et les encourage à suivre ce chemin pour parvenir au seul bonheur qui est la vie avec Dieu.

 

Père Claude
Prieur du Bec

Salle du Chapitre - Abbaye Notre Dame du Bec