Dimanche 3 octobre :
Ce cinquième degré d’humilité traite de l’ouverture du cœur. Il est inévitable que nous ayons des mauvaises pensées : convoitises, jalousies, rancunes, désirs de vengeance, désespérance, etc… Mais il ne faut pas les laisser nous envahir l’esprit, ni le cœur.
S’appuyant sur l’Écriture, saint Benoît nous invite à s’en défaire en les avouant à un père spirituel, afin de retrouver notre liberté et la paix du cœur.
Lundi 4 octobre, fête de saint François d’Assise :
Ce sixième degré d’humilité serait insupportable s’il n’y avait à la fin cette citation du psaume 72, verset 22 : « et c’est toujours moi, près de toi. » Humainement, être réduit à rien est inacceptable, révoltant même, puisque l’homme cherche, avec raison, plutôt l’épanouissement de sa personnalité!
C’est dans la foi que l’on peut reconnaître la présence du Christ dans cet abaissement total, car lui-même l’a vécu et il est mort par amour pour tous les hommes. Même s’il nous arrivait d’être anéantis, nous savons que Jésus est avec nous, que le Père est présent. Nous rejoignons ainsi Jésus dans son humilité. Et l’on peut aussi évoquer aujourd’hui la figure de saint François qui a vécu dans cette pauvreté et cette humilité radicale, mais aussi, et surtout, dans la ‘’joie parfaite’’ d’une vie offerte pour le Christ et avec le Christ.Mardi 5 octobre :
Le septième degré d’humilité nous indique la véritable attitude de celui qui est véritablement humble. Ce n’est pas une humilité de façade qui est une forme d’orgueil ; c’est, au contraire, une attitude sincère, une disposition du cœur et de tout l’être chez celui qui se reconnaît tel qu’il est en vérité, c’est-à-dire un pauvre, un nécessiteux du Seigneur.
Le sens de cette humilité est donné par des citations de psaumes (Ps. 21,7 et Ps. 87,16) qui sont des prières de pauvres, d’humiliés, de persécutés. Ces psaumes, surtout le Ps. 21 qui est le psaume de la Passion de Jésus, le Fils de Dieu qui donne sa vie, nous configurent au Christ dans son mystère pascal.
Enfin, le psaume 118, verset 71 : « Il m’est bon que tu m’aies humilié, afin que j’apprenne ta Loi » donne le sens de cette humilité : c’est l’apprentissage de la Loi. Et pratiquer le Loi, c’est accueillir la volonté de Dieu, s’y soumettre, se laisser façonner par Lui, recevoir la vie et tout son amour à l’exemple du Fils qui a toujours fait la volonté de son Père.
Mercredi 6 octobre :
Lorsqu’on entre au monastère, on accepte de vivre dans une communauté, un corps ecclésial, qui n’est pas une structure étouffante. C’est un ensemble de personnes réunies dans un même but : la recherche de Dieu. La communauté suit la Règle de saint Benoît et des usages qui lui sont propres.
Le nouveau frère n’arrive pas pour tout changer ; au contraire, il doit être dans une attitude d’accueil pour accepter la vie commune avec son rythme, des frères qui sont arrivés avant lui, et souvent depuis plus longtemps, et qui ont, eux aussi, acceptés cette vie et la pratiquent avec humilité. Naturellement, il peut qu’il y ait, de temps à autre, des choses à changer, à améliorer, car l’institution n’est pas figée. Mais dans son ensemble, la communauté, avec sa liturgie, ses temps de prière, de travail, la vie fraternelle, est un don de Dieu auquel nous répondons par notre engagement de chaque jour.
Jeudi 7 octobre :
Ce neuvième degré d’humilité fait écho au chapitre 6 ‘’du silence’’. Le silence a un rapport très fort avec l’humilité. On imagine aisément les beaux parleurs qui savent tout et veulent le montrer. Leur attitude n’est pas des plus modestes. On voit, au contraire, beaucoup d’humilité chez les vrais savants qui ne cherchent pas à écraser par leur science ceux qui sont en face d’eux. Au contraire, ils savent écouter et reconnaître quand ils n’ont pas la réponse à telle ou telle question.
Il est recommandé au moine de limiter sa parole pour conserver le silence et le recueillement afin d’être en attitude d’écoute et d’accueil : écoute de la Parole de Dieu lue et écoutée directement, ou bien commentée dans l’enseignement ou la prédication.
La parole pour le moine est d’abord la méditation de la prière vocale, à commencer par les psaumes qui constituent la substance de l’office divin. Elle est nécessaire dans les rapports fraternels, mais ne doit pas déborder en conversations stériles ou mondaines.
Vendredi 8 octobre :
Ce dixième degré sur le rire surprend toujours un peu ; mais il n’est pas nouveau dans la Règle. On trouve déjà cette recommandation au chapitre 4 sur les instruments des bonnes œuvres où le rire y est d’ailleurs associé au bavardage : « Ne pas aimer à beaucoup parler ; ne pas dire de paroles vides, ni de facéties ; ne pas aimer le rire excessif et éclatant (v. 52 à 54) ».
Ce qui est visé ici, c’est l’excès de parole qui nuit au recueillement et traduit un esprit superficiel ; c’est le rire excessif et bruyant, le rire à propos de tout et de n’importe quoi. Car du rire, on peut facilement tomber dans la dérision, dans l’ironie ou la moquerie, et cela aux dépens d’autrui, le rire devient alors blessant.
Saint Benoît, en demandant de maîtriser ses réactions trop spontanées, cherche avant tout à ce que le moine ait toujours conscience de rester en présence de Dieu, d’être habité par l’Esprit-Sain. Il recommande l’attention à la Parole de Dieu donnée en Jésus, et l’attention aux frères comme aux personnes qui nous entourent, alors qu’un comportement trop léger ou agité peut nous entrainer à l’oubli.
Eviter le rire facile ne signifie aucunement d’être triste ou renfrogné. La joie est chrétienne ; elle est un fruit de l’Esprit-Saint ; elle vient de la paix donnée par Dieu, de l’amour vécu comme don de soi. Elle est bien plus profonde qu’une apparence de gaité qui peut traduire en réalité une tristesse et une souffrance cachée. Elle est fondée sur le salut donné par Jésus dans sa victoire pascale.
Samedi 9 octobre :
Ce onzième degré d’humilité sur la parole se rapproche des deux précédents. Ils ont un écho dans les instruments des bonnes œuvres que nous rappelions hier (voir au chapitre 4, les versets 52, 53 et 54) : maîtriser sa langue, maîtriser le rire, parler peu.
La parole prend plus de poids lorsqu’elle est enveloppée de silence. Parler trop amène souvent à se mettre en avant, à attirer l’attention sur soi ; il est important de rester discret, car trop de paroles dévaluent la parole. Encore une fois, notre parole doit se référer à la Parole vivante, le Christ, cette Parole qu’il nous fait toujours entendre, écouter et scruter pour qu’elle façonne et imprègne notre propre langage et nos mots.
Ainsi, nous pourrons être des témoins de sa présence pour ceux qui nous écoutent.
Père Claude
Prieur du Bec