Paroles de la salle du Chapitre – S35

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Catégorie : Vie monastique

Chaque matin, une parole du Chapitre du Bec.
Par le Père Claude, Prieur claustral.

Après ces quatre derniers mois de commentaires de la Règle de saint Benoît, il est prévu de recommencer à la relire depuis le Prologue pour qu’elle soit à nouveau commenté par le supérieur.

Comme toute Parole de Dieu, notre Règle est un texte ‘’vivant’’ qui doit se renouveler chaque matin, même si on ne peut éviter certaines ‘’redites’’. Heureusement que l’Esprit Saint nous évite ce risque si on se met à son écoute dans cette parole quotidienne et qu’on accueille la nouveauté du jour présent dans son actualité biblique, festive ou événementielle.

« Aujourd’hui, écoutez donc la voix du Seigneur qui nous parle par la parole de notre père saint Benoît ! »Mercredi 1er septembre, journée de la Création :

     Il y a quelques années, le Pape François a fait du premier septembre, une journée de prière pour la création. Et il nous propose pour ce mois de septembre cette intention de prière :

« Prions pour que nous fassions des choix courageux en faveur d’un style de vie sobre et durable, en nous réjouissant de voir des jeunes s’y engager résolument. » Et dans son encyclique Laudato si (n° 223) il exhorte ainsi à la sobriété :

« La sobriété, qui est vécue avec liberté et de manière consciente, est libératrice. Ce n’est pas moins de vie, ce n’est pas une basse intensité de vie, mais tout le contraire ; car, en réalité, ceux qui jouissent plus et vivent mieux chaque moment sont ceux qui cessent de picorer ici et là en cherchant toujours ce qu’ils n’ont pas, et qui font l’expérience de ce qu’est valoriser chaque personne et chaque chose, en apprenant à entrer en contact et en sachant jouir des choses les plus simples. Ils ont ainsi moins de besoins insatisfaits, et sont moins fatigués et moins tourmentés. On peut vivre intensément avec peu, surtout quand on est capable d’apprécier d’autres plaisirs et qu’on trouve satisfaction dans les rencontres fraternelles, dans le service, dans le déploiement de ses charismes, dans la musique et dans l’art, dans le contact avec la nature, dans la prière. Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent ».

Nous sommes donc invités à prendre conscience de la beauté de la création, à nous situer à notre juste place de créature au milieu de l’univers, mais, en même temps, en restant responsables de l’univers créé, ce qui implique respect et partage des ressources de la terre. Nous pouvons nous sentir impuissants dans cet effort, car il y a des décisions et des choix politiques et sociaux qui nous dépassent. Mais c’est ensemble que nous pouvons peser sur ces choix et cette prise de conscience. Les deux textes que nous venons d’entendre à l’office peuvent nous aider, notamment le début de l’épitre aux Hébreux qui montre la place du Fils de Dieu comme Seigneur de l’univers. Et le Prologue de la Règle nous redit notre place de créature dans tout l’univers créé par Dieu.

 

Jeudi 2 septembre :

Quand nous reprenons la lecture de la Règle – et cela trois fois par an – nous avons l’impression de répétition. Et pourtant, c’est chaque fois un nouvel appel à ouvrir l’oreille de notre cœur, à nous remettre en marche, à sortir de notre torpeur, car la nature, les habitudes, notre pesanteur sont toujours là qui nous alourdissent, qui nous endorment, qui ralentissent notre élan et notre ardeur à servir le Seigneur.

Saint Benoît nous exhorte – en fait, ce n’est pas lui, mais l’Écriture, donc l’autorité divine – à sortir de notre sommeil.  Ce second passage du Prologue que nous venons d’entendre : « levons-nous donc, à la fin ! L’Écriture nous y entraîne : « Voici l’heure, pour nous, de sortir du sommeil. »  » est une suite de citations bibliques. On pourrait ajouter ce texte du troisième chant du Serviteur d’Isaïe : « Chaque matin, le Seigneur m’éveille, il éveille mon oreille pour qu’en disciple, j’écoute. Le Seigneur mon Dieu m’a ouvert l’oreille, et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. » (Is.50, 5).

Ce texte fait partie de la liturgie des Rameaux et du Mercredi Saint. En le lisant et en le faisant nôtre, nous nous mettons à la suite du Christ qui nous appelle à le suivre sur son chemin pascal. La suite de la Règle nous le montrera. Cet appel s’adresse à chacun, non pas à nous seul, mais en communauté, en Église. Et aujourd’hui, nous sommes en union avec notre Église diocésaine, puisque nous célébrons la fête de la Dédicace de la cathédrale du diocèse d’Évreux.

« Que celui qui a des oreilles entende ce que l’Esprit dit aux Églises : Venez, mes fils, écoutez-moi … » C’est donc ensemble, avec les chrétiens qui nous entourent, et dans la diversité des vocations, que nous annonçons le Royaume de Dieu.

 

Vendredi 3 septembre :

Le Prologue de la Règle continue de développer l’invitation du maître. A celui qui demeure en éveil, le Seigneur propose la vie vraie et éternelle. Pour y parvenir, il donne tout un programme contenu dans le psaume 33.

Cette vie, saint Benoît l’a lui-même recherchée en se retirant du monde et en étant le guide de ses frères pour suivre, ensemble, le Christ. On ne peut manquer d’évoquer saint Grégoire le Grand que nous fêtons aujourd’hui. Il a relaté la vie de saint Benoît dans ses dialogues et a mené lui-même la vie monastique en s’inspirant de son modèle. Lorsqu’on lit la vie de saint Benoît, on retrouve concrètement ce qu’il enseigne dans sa Règle ; vie et enseignement sont inséparables.

 

Samedi 4 septembre :

Dans le chapitre 4 de la Règle, ‘’les instruments des bonnes œuvres’’, saint Benoît donne, entre autres, ces deux conseils :

N°50 : « Briser immédiatement contre le Christ les mauvaises pensées qui s’approchent du cœur, et les découvrir au père spirituel. »

Et n°42 : « Quand on voit un bien en soi, le rapporter à Dieu, non à soi-même. »

Ces deux instruments se retrouvent dans ce paragraphe du Prologue, parme les conseils de saint Benoît pour habiter la Maison du Seigneur. Le chemin est semé d’embûches ; le tentateur y place des pièges dans lesquels nous pouvons tomber facilement à cause de ses suggestions. Rappelons-nous la ruse du serpent : « Mais non, vous ne mourrez pas ! »

Il nous faut vivre avec un cœur vigilant et briser contre le Christ les sollicitations et les persuasions du « diable malin » , comme dit saint Benoît. Sinon, c’est vite fait de décocher un coup de langue à celui qui nous a offensés, ou de laisser monter la colère, ou de laisser s’endormir sa conscience.

Le complément de cette attitude, c’est l’humilité. Non seulement nous pouvons résister à l’adversaire, mais mieux, nous pouvons faire le bien en obéissant aux commandements du Seigneur. Et dans ce cas, reconnaissons que c’est grâce au Seigneur que nous accomplissons ce bien, car c’est lui qui nous l’inspire et nous devons demeurer dans la gratitude pour tous ses dons.

Père Claude
Prieur du Bec