La Parole de Dieu nous enseigne comment être riches en vue de Dieu, comment être riches de la vie du Christ, comment nous ouvrir à la richesse qui seule nous rendra heureux pour toujours.
Le Sage de la bible considère d’abord la richesse matérielle : « que reste-t-il à l’homme de toute sa peine sous le soleil ? »
Tout ce livre qui semble pessimiste est sauvé et intégré dans les Écritures inspirées – selon la tradition juive – par cette simple incise qui revient de façon insistante : « sous le soleil » : ce qui laisse entendre qu’au-delà du soleil, la perspective, qui est celle de Dieu, laisse place à l’espérance.C’est cette vision de foi, cette recherche des choses d’en-haut – enracinée dans la résurrection de Jésus – que saint Paul nous invite à vivre avec le Christ qui nous conduit à la vraie connaissance, à la vraie richesse.
L’Évangile de ce dimanche nous présente le premier panneau de ce triptyque d’images au cœur de l’évangile selon saint Luc : nous est brossé ici le tableau de la richesse devenue une idole qui replie son possesseur sur soi-même dans l’oubli de Dieu. Elle trouvera son pendant dans une pauvreté inquiète à l’excès du souci immédiat et qui oublie que la vie vient de Dieu et que sa providence veille.
Jésus nous appelle à chercher à travers ces réalités terre-à-terre, qui nous écartèlent, un troisième volet : les réalités d’En-haut, la vie en plénitude dans la confiance en Dieu et le partage avec les autres. C’est là la richesse selon Dieu qui rend heureux, car c’est la Vie même de Dieu qu’elle offre à ceux qui l’accueillent.
L’illustration de la richesse qui paralyse la vie est très parlante : Jésus décrit bien ‘l’âpreté au gain’ de cet homme encombré de ses richesses, encombré de lui-même, sans une pensée pour Dieu – qu’il n’invoque pas ; ni pour les autres – auxquels il ne parle plus. Il ne parle plus qu’à lui-même : son projet de vie n’est plus qu’une hypertrophie du moi qui ne dépasse guère sa table et son lit : son âme est étouffée par l’idolâtrie de ses possessions. Espérons que le souvenir de la mort physique opère en lui un électrochoc qui le ranime de sa léthargie : car la réalité supérieure qui fait vivre, rappelle saint Paul, est relation, et la relation vraie est l’amour de Dieu et du prochain.
Nous comprenons mieux les exhortations pressantes de saint Benoît dans sa Règle, en écho à la Parole de Dieu, à nous hâter de choisir la Vie. Pour ne pas perdre de vue ce dynamisme de l’amour, Benoît nous demande paradoxalement ‘d’avoir toujours la mort devant les yeux’. Ce n’est en rien une imagination morbide de l’agonie. Notre Règle nous invite à toujours demeurer en présence de Dieu par une anticipation confiante et quotidienne du passage avec Jésus vers le Père, source de toute Vie.
En toutes circonstances élever notre cœur dans un mouvement de foi et d’amour, offrir avec Jésus nos richesses et pauvretés aux autres ; c’est une Pâque continuelle, une entrée avec lui dans l’Esprit, qui jaillit en vie éternelle. Car la vraie richesse c’est la vie en plénitude. La bonne nouvelle c’est que rien ne peut nous en détourner si nous nous ouvrons au souffle de l’amour de Dieu dans la confiance au Christ, qui nous conduit au Père qui nous aime en premier et nous remplit de sa Vie chaque jour, en chaque eucharistie.
Frère Jean-Marie