Dans le vocabulaire d’aujourd’hui, on entend souvent cette expression : « c’est trop beau ! » « trop super » « trop cool ». L’autre jour, au magasin, une femme, pour remercier son mari qui lui faisait cadeau d’une céramique lui dit en l’embrassant : « tu es trop chou ».
Reconnaissons que ces expressions sont d’une profondeur toute relative…
Par contre, à un autre niveau, dans l’Evangile que nous venons d’entendre, nous pouvons dire que nous y trouvons vraiment trop de symboles, de richesse, de beauté, de pardon, d’abondance, de plénitude, d’amour, de confiance en l’homme de la part de Dieu, une confiance illimitée.
C’est cette générosité qui caractérise Dieu : la mesure bien pleine, secouée, débordante, promise par Dieu, nous est donnée dans ces Évangiles de la Résurrection du Seigneur – c’est le trop plein de grâces – Une des significations du dictionnaire concernant l’adverbe « trop » est la suivante : « c’est trop beau pour être vrai, on n’ose y croire »
En bien, justement, il faut croire aux richesses éternelles données dans cette 3ème épiphanie pascale. Cette épiphanie en Galilée, sur le bord du lac de Tibériade, ouvre le temps, le nôtre, sur le 9ème jour. Jésus nous attend à l’aurore du jour, c’est le temps de l’Église – l’Église, peuple de Dieu, peuple de la promesse tenue – l’Église de Jésus au cœur de la tourmente encore aujourd’hui, mais elle est, malgré toutes ses blessures, elle est, à jamais, ce grand vent d’éternité, de paix, de grâces, sur notre terre charnelle.
« Au lever du jour, Jésus se tint sur le rivage, mais les disciples ne savaient pas que c’était Lui ». Cette apparition, au bord du lac, est profondément touchante. Jésus n’est pas reconnu immédiatement. La pèche est, encore une fois, miraculeuse et tout le monde se régale et se réjouit autour d’un barbecue de poissons grillés !
Cette scène, si quotidienne, est d’une profondeur inouïe comme le repas d’Emmaüs. Dans ce repas au bord du lac préparé par Jésus avec du poisson et du pain sur des braises, la référence à la multiplication des pains est claire : et donc, le symbole de l’Eucharistie. Notons que c’est dans la même région qu’a eu lieu le miracle des noces de Cana, l’eau changée en vin.
Dans une des catacombes romaines, on voit le Christ, pêcheur d’hommes, sous les traits de Tobie. Parce qu’il y a une relation entre l’histoire de Tobie et la scène décrite dans l’Évangile de ce jour. C’est avec les remèdes secrets du poisson que le démon est chassé de la chambre nuptiale et Sara délivrée – et que Tobie recouvre la vue.
Tout cela, ces merveilles, ces guérisons, le Christ les accomplit en purifiant Marie Madeleine de ses sept démons, et en donnant à Dieu la plénitude de son amour.
Ichtus, le Poisson, sont les lettres sacrées, comme Jésus, fils de Dieu Sauveur, est une remède passé au feu de la Passion. Ses remèdes nous illuminent, nous guérissent, nous délivrent chaque jour et chaque fois que nous invoquons le nom de Jésus Sauveur.
Au verso des croix orthodoxes, nous pouvons lire ces mots : « Sauve et garde ». Sauves moi et gardes moi de tout péché.
Une autre expression populaire, mais, en même temps, très profonde, si nous y prêtons attention est la suivante : « Vous allez bien prendre quelque chose en attendant ». Nous avons souvent entendu ces paroles quand nous étions arrivés en avance pour un rendez-vous ou que la personne que nous attendions était en retard : « Vous allez bien prendre quelque chose en attendant ». C’est un peu ce que le Seigneur a dit à ses disciples en les invitant à manger avec Lui les poissons qu’il avait fait griller à leur intention.
Et, dans cette attente, il se passe plein de choses, plein d’enseignements. Nous sommes encore dans cette attente, nous tous réunis ce matin dans cette église. Et nous allons, encore une fois, être comblés, rassasiés, non par quelque chose mais par quelqu’un : Jésus, lui même, qui se donne à nous sous les espèces du pain et du vin : c’est la Pâque que nous célébrons à chaque Eucharistie et plus particulièrement en ce temps ou nous célébrons le mystère Pascal pendant ces semaines, « en attendant », car Jésus, dans l’Apocalypse, nous dit : »Je viens » non pas « Je reviens », mais je viens. Il ne s’agit pas d’un retour mais d’une nouvelle venue, d’une toujours nouvelle venue. Nous ne pouvons comprendre ce mystère de la venue du Seigneur que dans la foi.
Et nous aurions tendance à dire : mais, rien ne vient ! Justement, au cœur de la foi, une absence…Et nous n’avons pas à vouloir combler cette absence car on risquerait de tuer la foi. C’est un peu ce qui se passe avec ceux qui nous ont quittés, nous les retrouvons au creux d’une absence. C’est ainsi que nous retrouvons Jésus encore mieux par la foi que celles et ceux qui l’ont rencontré sur cette terre et qui n’ont pas cru en lui. « Prendre quelque chose en attendant »
Et, pendant cette absence, Jésus comble Pierre de son amour. Il ne revient pas sur son reniement mais il demande à Pierre : « Est ce que tu m’aimes ? » « Est ce que tu crois ? »
Ces mêmes paroles nous sont adressées ce matin à chacun de nous, dans le secret de notre conscience, de notre cœur.
Alors, traversant toutes nos obscurités, disons, à la suite de Pierre :
« Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime »
Fr. Michel