Évangile : « Je suis la porte des brebis »
En ce temps-là, Jésus déclara : « Amen, amen, je vous le dis : celui qui entre dans l’enclos des brebis sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit. Celui qui entre par la porte, c’est le pasteur, le berger des brebis. Le portier lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait sortir. Quand il a poussé dehors toutes les siennes, il marche à leur tête, et les brebis le suivent, car elles connaissent sa voix. Jamais elles ne suivront un étranger, mais elles s’enfuiront loin de lui, car elles ne connaissent pas la voix des étrangers. »
Jésus employa cette image pour s’adresser aux pharisiens, mais eux ne comprirent pas de quoi il leur parlait. C’est pourquoi Jésus reprit la parole : « Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage. Le voleur ne vient que pour voler, égorger, faire périr. Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance. »
Homélie :
Ce 4e dimanche de Pâques est appelé dimanche du Bon Pasteur. Cette expression évoque bien souvent des images parfois mièvres de Jésus portant sa brebis sur les épaules ou marchant à la tête d’un troupeau docile sur des collines verdoyantes. La réalité biblique est beaucoup plus éloignée de ses représentations bucoliques. L’allégorie du pasteur chez les prophètes Ezéquiel, Jérémie ou Isaïe, montre au contraire un berger qui doit lutter, parfois au péril de sa vie, contre les prédateurs qui cherchent à attaquer son troupeau. Et le chapitre 10 de l’Évangile selon saint Jean dont nous venons d’entendre le début se situe dans un contexte polémique.
Jésus vient de guérir l’aveugle de naissance. Ce signe qu’il vient d’accomplir provoque la colère des pharisiens qui expulse l’homme guéri de la synagogue. Celui-ci a reconnu dans la foi la voix de Jésus : C’est lui le Fils de Dieu qui le fait entrer dans son bercail, la communauté de ses disciples. Et le chapitre 9 se terminait sur cette déclaration de Jésus à l’adresse des pharisiens : » Je suis venu en ce monde pour une remise en question : Pour que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. »
C’est donc pour eux que Jésus prononce cette parabole du berger et de la porte. Elle s’inspire de la vie ordinaire. Lorsque les troupeaux étaient rassemblés, le berger pouvait identifier le sien car les brebis reconnaissaient sa voix et le suivait. Le brigand qui entre par effraction ne peut se faire reconnaître.
Mais au-delà du niveau ordinaire, cette parabole recèle un autre sens. Le berger renvoie à l’histoire d’Israël. Dieu a confié son peuple à des guides sûrs : Moïse, Josué, David et d’autres. Ils ont su le défendre contre les adversaires et le conduire selon les commandements du Seigneur. Ils l’ont ramené sur le bon chemin lorsqu’il s’égarait à la suite des faux prophètes où se pervertissait dans l’idolâtrie.
Voyant que ces auditeurs ne comprennent pas cette parabole, Jésus devient plus clair. Il s’identifie à la réalité imagée qu’il vient de décrire. Il est lui-même la Porte. Il est lui-même le Berger du troupeau de ceux qui écoutent sa voix et qui le suivent.
Il déclare solennellement : » Amen, amen, je vous le dis : Moi, je suis la porte des brebis. Tous ceux qui sont venus avant moi sont des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. » C’est par Lui qu’il faut passer pour être sauvé.
Ceux qu’il considère comme des voleurs et des bandits, ce sont tous ceux qui égarent le peuple et le détournent de la voie du salut, aussi bien les faux prophètes qui ont égaré Israël que ceux qui refuseront d’admettre que Jésus est le Sauveur. Les chefs du peuple d’Israël, charger par Dieu de le guider, étaient déjà tendus vers Jésus car, selon les paroles de saint Ignace d’Antioche : » Jésus est la porte par ou entrent Abraham, Isaac, Jacob, les prophètes, les apôtres et l’Évangile. »
Jésus est à la fois la porte et le berger. Il est la porte par laquelle les brebis peuvent aller et venir librement, car avec lui elles sont en sécurité. Elles peuvent trouver un pâturage et obtenir la vie en plénitude. Elle le suivent car il les nourrit de sa Parole. Il est une source de vie inépuisable pour tous les hommes.
Reconnaître la voix de Jésus, le vrai berger, c’est écouter sa Parole, c’est accueillir son message de salut. Nous en avons une parfaite illustration dans le récit des Actes des Apôtres que nous avons entendu. Au jour de la Pentecôte, Pierre annonce salut apporté par Jésus. Ses auditeurs ont le cœur ébranlé après avoir entendu ses paroles et lui demandent : « Que devons-nous faire ? » Et Pierre les exhorte à se convertir et à recevoir le baptême au nom de Jésus-Christ pour le pardon de leurs péchés. Voilà le moyen de passer par la porte. Le baptême et la conversion sont la condition pour que Jésus nous accueille en son bercail. « Qui entre par moi sera sauvé. »
Mais il ne suffit pas de recevoir le nom de chrétien pour être un vrai disciple, membre de la communauté ecclésiale. Pierre va plus loin dans sa première épître. Il nous faut également suivre le Christ sur son chemin pascal. « Il vous a laissé un modèle pour que vous suiviez ces traces. » il a offert sa vie, il est mort sur la croix. C’est par ses blessures que nous avons été guéri, c’est par sa mort que nous sommes sauvés. Nous étions comme des brebis sans berger et nous sommes retournés vers notre Berger, le gardien de nos âmes.
Ainsi pour avoir la vie en plénitude, il nous faut d’abord écouter la voix de notre Pasteur, c’est-à-dire obéir à sa Parole, la méditer et la mettre en pratique. C’est en aimant comme lui nous a aimé que nous pourrons être rassemblés autour de lui. C’est tout au long de nos vies, de nos journées que nous avons à répondre à son appel, nous offrir. Que sa Pâque continue d’illuminer et de transformer nos vies.
Frère Claude
Prieur du Bec