Évangile : « Dieu fera justice à ses élus qui crient vers lui »
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples une parabole sur la nécessité pour eux de toujours prier sans se décourager : « Il y avait dans une ville un juge qui ne craignait pas Dieu et ne respectait pas les hommes. Dans cette même ville, il y avait une veuve qui venait lui demander : “Rends-moi justice contre mon adversaire.” Longtemps il refusa ; puis il se dit : “Même si je ne crains pas Dieu et ne respecte personne, comme cette veuve commence à m’ennuyer, je vais lui rendre justice pour qu’elle ne vienne plus sans cesse m’assommer.” »
Le Seigneur ajouta : « Écoutez bien ce que dit ce juge dépourvu de justice ! Et Dieu ne ferait pas justice à ses élus, qui crient vers lui jour et nuit ? Les fait-il attendre ? Je vous le déclare : bien vite, il leur fera justice. Cependant, le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »Homélie :
Encore une parabole, une histoire surprenante de Jésus en ce 29 ème dimanche du temps ordinaire. Comme toujours, les images que Jésus emploie sont là pour nous donner un message. Le message d’aujourd’hui concerne notre façon de prier, à nous aide à un certain retour sur nous-mêmes et sur notre expérience de la prière.
Regardons attentivement la scène que propose Jésus. Une vieille dame veuve est dans le besoin. Elle se doit de demander l’aumône. Elle compte sur le soutien d’autrui. Elle s’adresse au juge parce que dans le peuple juif, les juges ne faisaient pas que rendre la justice, ils étaient aussi comme des répartiteurs de bienfaits. Ils jouaient un rôle social important. Ils pouvaient mettre des gens à l’écart et en privilégier d’autres. La veuve sait cela. C’est pourquoi, elle se fait si insistante. Sa persévérance aura raison du juge qui lui accorde ce qu’elle demande.
Dans la première lecture, la scène théâtrale de Moïse dont on soutient les bras nous donne aussi un exemple de persévérance dans la prière.
A travers cette parabole, Jésus donne une leçon, un enseignement à ses disciples et donc à nous tous ici présents. Ce message de Jésus c’est celui de la persévérance dans notre rencontre de Dieu dans la prière. La prière chrétienne ne se réduit pas aux invocations, aux prières apprises par cœur, au chapelet etc. Elle vient du fond du cœur et cherche les mots pour se dire. Ce qui est important c’est que dans notre rencontre de Dieu, nous n’ayons pas peur d’être nous-mêmes comme cette veuve démunie.
En effet, être soi-même devant Dieu – comme la veuve devant le juge – c’est revenir souvent à la charge, répéter les mêmes mots, rappeler les mêmes intentions, présenter avec simplicité ses besoins ainsi que ceux des gens qu’on aime.
On dit que la prière est avant tout une conversation avec Dieu. Oui! une conversation qui n’a pas peur de se renouveler, de dire ce qu’on a dans le cœur et de présenter à Dieu ses demandes avec confiance et persévérance. Jésus nous l’a dit « Demandez et recevrez, frappez et l’on vous ouvrira ». (Luc 11, 9) La prière est le défi de toute une vie. Elle est l’huile précieuse de cette flamme qui doit briller dans la nuit, cette flamme qui est notre foi en Dieu et en son Fils unique Jésus Christ.
Cette histoire du juge et de la veuve ne se limite pas à vanter la persévérance de la veuve devant le juge dépourvu de justice. Jésus lui donne une conclusion qui nous surprend. « Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? »
Cette phrase interroge tout un chacun de nous. Pour ma part, je crois que Jésus ne désire pas seulement de vanter la persévérance de la veuve, il veut faire ressortir la foi à toute épreuve qui l’animait et où elle a trouvé la force de persévérer. Sa foi l’a soutenue et elle n’en a pas démordu.
Certes, l’Église est aujourd’hui en grande difficulté. Les chrétiens diminuent en nombre et sont confrontés de plus en plus souvent à des oppositions et des méfiances, parfois à des intolérances ou des persécutions. Il devient de plus en plus difficile de s’afficher comme chrétien et, pour le demeurer, il est nécessaire de mener une sorte de combat.
Dans la société actuelle, il faut beaucoup de courage à des jeunes pour exprimer leur appartenance au Christ et à son Église et pour exprimer des positions qui ne sont pas majoritaires. Être chrétien aujourd’hui et le demeurer, demande une grande force, une persévérance et une vraie liberté, comme l’avait si bien dit, d’une manière forte et ferme, Saint Paul à son disciple Timothée : « proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire ». La prière des uns est plus que nécessaire pour soutenir et aider les autres à rester fidèles à leur foi. La foi de la veuve est l’image de la foi en la Parole de Dieu, qui est Jésus lui-même, le Verbe de Dieu incarné qu’on appelle ici le Fils de l’homme.
Cette foi que Jésus souhaite trouver à son retour, c’est la foi que nous portons en nous déjà. C’est pourquoi, nous nous devons de la cultiver dans une prière confiante et dans une rencontre de Dieu toujours nouvelle. Sa proximité s’est révélée tout au cours de l’histoire du Salut. Ce qu’il attend de nous c’est de ne jamais nous lasser devant lui, même lorsqu’il nous paraît absent ou sourd à nos demandes. Il y répond de la meilleure façon qui soit pour nous et pour l’Église. Si nos attentes sont déçues, laissons cette parabole réveiller notre foi : « Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit ? Est-ce qu’Il les fait attendre. Je vous le déclare, sans tarder, il leur fera justice ».
Demandons au Seigneur d’augmenter notre foi pour que celle-ci nous permette de le rencontrer maintenant et aujourd’hui en préparation de la rencontre éternelle qui sera la nôtre avec lui un jour.
Frère Dieudonné
Moine du Bec