Écouter une parole du Bec en 2023 – S33 – 13 aout

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Catégorie : Vie monastique

CHAPITRE 59 : DES FILS DE NOBLES OU DE PAUVRES QUI SONT OFFERTS.

Dimanche 13 août :

Cet usage d’offrir des enfants au monastère pour que, élevés et formés, ils y demeurent toute leur vie, n’est plus recevable aujourd’hui. On ne conçoit plus un engagement à vie sans liberté personnelle. Il y a eu dans le passé, et même jusqu’au milieu du XXe siècle, des vocations qu’on pourrait dire ‘’forcées’’, et qui relevaient plus des parents que du candidat lui-même. On sait ce qui en est résulté bien souvent. Aussi, aujourd’hui, au-delà de cet ancien usage, nous pouvons retenir deux choses :

D’abord que nous sommes tous égaux devant Dieu, car pour Dieu il n’y a pas de différence entre riches et pauvres, entre nobles et gens du peuple. Dieu regarde le cœur et Il appelle qui Il veut, quelle que soit notre condition sociale, ethnique, culturelle… Un psaume dit bien : « Prêtez l’oreille, habitants de l’univers, gens du commun et gens de condition, riches et pauvres ensemble ». En nous offrant à Dieu, c’est bien tout notre être que nous Lui consacrons.

Et puis, autre remarque, la mention de la nappe de l’autel nous rappelle que notre oblation est prise dans l’Eucharistie, et donc unie à l’offrande du Christ. Toute notre vie est prise dans son sacrifice. Déjà le baptême était une plongée dans la mort et la résurrection du Seigneur et la profession est le prolongement du baptême pour une vie entièrement consacrée à son service.

A partir d’un usage qui n’a plus cours, ces deux remarques peuvent encore nous concerner aujourd’hui si nous nous rappelons notre profession et que nous renouvelons notre offrande chaque fois que nous célébrons l’eucharistie.CHAPITRE 60 : DES PRÊTRES QUI VOUDRAIENT HABITER DANS LE MONASTÈRE.

Lundi 14 août :

Saint Benoît nous rappelle ici que, dans la vie monastique, ce qui est premier c’est l’obéissance à la Règle et la stabilité dans le monastère. Ceci vaut pour tous ceux qui entrent au monastère, et saint Benoît envisage ici le cas de prêtres ou de clercs qui demanderaient à y entrer. Leur sacerdoce ou leur état clérical ne les place pas au-dessus des autres, ni ne les dispense d’observer tous les points de la Règle.

A tous ceux qui entrent, qu’ils soient prêtres ou laïcs, Jésus pose la question : « Mon ami, pourquoi es-tu venu ? » Il nous appelle ‘’ami’’, ce qui est une marque de confiance, le signe d’une relation personnelle. C’est ainsi qu’il appelle les apôtres, mais il pose aussi la question à Judas venu le faire arrêter ! C’est donc une interpellation, une invitation à la vigilance, à nous rappeler toujours ce que nous venons chercher, sous quelle règle nous voulons servir, à accepter avec humilité ce qui nous est demandé et à revenir dans le droit chemin si nous nous en écartons par orgueil ou désobéissance.

Par-delà cet appel direct aux prêtres qui voudraient entrer au monastère, Jésus nous rappelle indirectement les exigences de notre vocation.

CHAPITRE 61 : DES MOINES ÉTRANGERS, COMMENT LES RECEVOIR.

Mardi 15 août, solennité de l’Assomption :

En cette fête de la glorification de Marie, nous prions avec toute l’Église en célébrant la Mère de Dieu. Elle est pour nous l’anticipation de ce que nous sommes appelés à vivre ; elle est l’image et la Mère de l’Église appelée à être glorifiée avec le Christ ressuscité.

Nous la prions spécialement pour notre communauté puisqu’elle est la patronne de notre abbaye N-D. du Bec, comme elle est aussi celle de la cathédrale d’Évreux qui porte le titre de N-D. de l’Assomption. C’est aussi l’occasion de prier pour notre diocèse et notre nouvel évêque.

Nous pouvons éclairer la lecture de la Règle par l’évangile de la Visitation (Luc 1, 39-55) qui est celui de la fête d’aujourd’hui. Marie est accueillie par Élisabeth qui en elle accueille Jésus lui-même. Ce récit est rempli d’humilité et de charité tant chez Marie que chez Élisabeth. Ainsi doit-il en être de nos rencontres, aussi bien entre nous, qu’avec ceux que nous accueillons ou rencontrons.

L’accueil d’un moine étranger relève d’abord de l’hospitalité qui est due à tous ceux qui se présentent au monastère pour un séjour plus ou moins long. On reconnaît le Christ en lui comme en chacun des hôtes qui se présentent. L’accueil relève de la simple charité.

Mais saint Benoît va plus loin en suggérant que ce moine peut être envoyé par Dieu ; il peut en effet poser un regard neuf sur la communauté qui l’accueille et faire des suggestions, mais avec l’humilité de la charité, précise saint Benoît, ce qui suppose délicatesse et respect. Cela peut aller jusqu’à envisager un transfert de stabilité du moine, ce qui est développé dans la seconde partie de ce chapitre.

Mercredi 16 août :

La suite du chapitre évoque la possibilité d’un transfert de stabilité d’un moine. Cela peut se faire à deux conditions d’après saint Benoît :

  • Si le moine en question peut édifier la communauté par son bon exemple.
  • Si l’abbé de sa communauté d’origine donne son accord.
  • Mais il est bien évident que cette situation reste exceptionnelle et suppose toujours une demande de l’intéressé.

On peut aussi retenir de ce chapitre ce que dit saint Benoît : « En tout lieu, on sert un seul Seigneur, on milite sous un seul Roi ». Nous avons tous un attachement à un monastère, à une communauté, en vertu de notre vœu de stabilité. Et chaque monastère est une école du service du Seigneur.

Il y aura toujours aussi des échanges entre monastères, soit par visites individuelles, soit même de communauté à communauté. Il peut donc y avoir, pour diverses raisons, des transferts de stabilité individuels, mais chaque cas doit être soigneusement examiné par l’abbé et la communauté qui accueille, et en accord avec l’abbé et la communauté d’où vient le moine, avant qu’une décision ne soit prise et en tout cas, après un temps de probation. Il faut aussi respecter les règles canoniques. C’est toujours le bien du frère qui est recherché, tout en respectant celui des communautés concernées.

CHAPITRE 62 : DES PRÊTRES DU MONASTÈRE.

Jeudi 17 août :

On peut penser que saint Benoît a dû connaitre des difficultés avec les prêtres dans les monastères, qu’ils soient anciens ou nouvellement ordonnés, car il se montre sévère. Il semble bien parler d’expérience quand il fait ses mises en garde à propos du sacerdoce car, sans doute, a-t-il remarqué une tentation chez certains prêtres, de vouloir se considérer comme supérieurs aux autres moines, alors qu’ils doivent fuir l’élèvement et l’orgueil. Cette tentation existe encore dans l’Église et pas seulement dans les monastères. Et le pape François la dénonce fréquemment en l’appelant : ‘’le cléricalisme’’. Ces mises en garde se retrouvent aussi en d’autres chapitres de sa Règle.

On pourrait croire que saint Benoît a une vision négative du sacerdoce ! Il veut seulement rappeler que le moine ordonné prêtre est, encore plus que tout un chacun, tenu à l’obéissance et à l’humilité ; le sacerdoce n’est pas une promotion, mais un service ; service de Dieu par une plus grande intimité avec le Christ qui s’est offert sur la croix, et service de la communauté. C’est ce que Jésus lui-même recommande à ses apôtres par son propre exemple : « Le Fils de l’homme est venu pour servir et non pour être servi ».

Le sacerdoce est un service d’Église, même s’il n’implique pas nécessairement de ministère ; la vocation du moine n’étant pas celle des prêtres séculiers ou des ordres apostoliques. Mais le moine est pleinement d’Église ; il y est à sa place, solidaire de tout le peuple de Dieu.

CHAPITRE 63 : LES RANGS DANS LA COMMUNAUTÉ.

Vendredi 18 août :

Pour saint Benoît, le respect de l’ordre d’entrée des frères dans la communauté est un facteur de paix. Et il ajoute à cela deux raisons qui peuvent modifier cet ordre : le mérite de la vie de certains frères et une décision de l’abbé. Il précise cependant que cette décision doit être rare et il met en garde l’abbé contre une décision injuste qui perturberait la communauté et affecterait sa paix.

Le respect des rangs d’entrée n’est pas uniquement principe de discipline, mais il exprime le respect que doivent garder les frères les uns envers les autres, chacun reconnaissant le Christ en son prochain.

Samedi 19 août, solennité de saint Bernard Tolomei :

Après avoir rappelé la nécessité de respecter les rangs dans la communauté, Saint Benoît insiste maintenant sur le respect qui doit pénétrer les relations entre les frères On retrouve là les indications citées dans ‘’les instruments des bonnes œuvres’’ n° 70 et 71 : « Vénérer les anciens et aimer les jeunes ».

Ce respect se traduit par la façon de se nommer entre soi, que ce soit en s’adressant la parole, ou que ce soit en parlant d’un tiers. Mais le vrai respect ne doit pas tomber dans l’obséquiosité, ni dans la familiarité qui pourrait tourner à la moquerie.

A propos de l’abbé, c’est parce qu’on est convaincu qu’il tient la place du Christ, qu’on lui doit le respect. Mais on peut élargir cette remarque à chacun de nous, car nous reconnaissons la présence du Christ en tous ceux qui portent son nom, surtout chez les plus humbles. Ce respect doit imprégner tous nos comportements en communauté.

 

 

Frère Claude
Prieur du Bec

Nappe de l'autel : oblation dans l'Eucharistie