Dimanche 25 juin :
Entre le chant des 150 psaumes dans la semaine proposé par saint Benoît et la répartition sur quatre semaines qui est proposée par la Liturgie des Heures en cours dans l’Église, nous avons, comme un certain nombre d’autres communautés, choisis de chanter le psautier sur deux semaines. En effet, si saint Benoît a organisé les offices de toute la semaine, il ne veut pas faire de l’ordre qu’il propose un absolu et laisse à quiconque la liberté « d’établir un autre ordre qu’il jugera meilleur », car, rappelons-nous, nous avons un engagement au service du Seigneur et de l’Église. Aussi, demandons-nous si nous répondons bien à cet appel du Seigneur. La fidélité à l’office divin est le signe de notre appartenance au Seigneur ; nous en avons fait le choix lors de notre entrée au monastère où nous vivons notre vocation de baptisés.
Sans la prière de l’office qui structure toutes nos journées, notre vie devient incomplète et perd sa dimension verticale ; notre lien fraternel n’est plus vivifié de l’intérieur par l’amour divin qui s’exprime dans la prière, car la célébration de l’office est vital pour chacun de nous.CHAPITRE 19 : DE LA DISCIPLINE DU CHANT.
Lundi 26 juin :
« Que votre homme intérieur s’accorde avec votre voix ». Pour parvenir à cet accord, il nous faut réaliser une conversion ; il faut nous tourner vers Dieu. Et c’est précisément ce que recommande saint Benoît : la foi en la présence de Dieu commande notre attitude dans la prière. Et c’est pour le célébrer que nous nous rassemblons, car le chant de l’office nous tourne vers Lui ; les psaumes que nous chantons nous le rappellent et c’est le sens des citations de psaumes données dans ce chapitre :
D’abord le psaume 2, 1 : « Servez le Seigneur dans la crainte », autrement dit avec respect. C’est ouvrir tout notre être, cœur, corps et esprit à la contemplation ; c’est nous laisser saisir par Dieu qui veut nous donner Sa Vie.
Ensuite le psaume 46, 8 : « Chantez en adoration », c’est-à-dire avec intelligence et sagesse. Il nous faut d’abord comprendre ce que nous disons. On voit ici le lien avec la lecture spirituelle, l’étude, la lectio Divina qui nous fait entrer dans le sens des Écritures, de la Parole de Dieu, car les psaumes sont Parole de Dieu.
Enfin le psaume 137, 1 : « Je te chanterai en présence des anges ». Lorsque nous célébrons l’office, nous sommes aussi unis à l’Église du ciel. Nous le sommes déjà avec celle de la terre, avec tous les fidèles, comme avec d’autres communautés et tous ceux qui comptent sur notre prière, comme nous aussi nous nous appuyons sur celle des autres, car dans la célébration liturgique nous ne sommes jamais seuls, il y a toujours communion entre le ciel et la terre. Rappelons-nous l’échelle de Jacob qui relie la terre au ciel et sur laquelle des anges montent et descendent (cf. chap. 7 de l’humilité).
Et la célébration régulière de l’office nous transformera intérieurement. Peu à peu, cette transformation apparaîtra dans nos manières d’être de sorte qu’il n’y ait plus de rupture entre notre attitude à l’office et le reste de notre vie.
CHAPITRE 20 : DE LA RÉVÉRENCE DANS LA PRIÈRE.
Mardi 27 juin :
Avec ce chapitre s’achève l’organisation de l’office divin. Saint Benoît en a détaillé l’ordonnance et le contenu. Mais il ne suffit pas de l’exécuter en le récitant point par point pour être quitte d’une tâche à accomplir, car s’il manque les dispositions intérieures, nous ne serions qu’un « airain qui resonne, une cymbale retentissante », pour reprendre les mots de saint Paul à propos de celui qui n’a pas la charité.
Saint Benoît précise qu’en présence de Dieu, notre cœur doit s’ajuster et présenter les dispositions suivantes : humilité, pureté, don total et contrition. Au chapitre précédent, il demandait déjà qu’il y ait correspondance entre nos paroles et notre cœur pour que ce que nous chantons soit vraiment sincère. De plus, c’est une prière communautaire qui doit être brève et pure, mais qui peut se prolonger sous l’effet de la grâce divine.
Toutes ces dispositions permettent de se laisser inspirer par Dieu, car c’est l’Esprit-Saint qui vient au secours de notre faiblesse et qui murmure en nous les mots de la prière. Il nous donne donc d’entrer dans l’intelligence des psaumes qui sont la Parole de Dieu, comme de prier dans le silence comme nous le chantons à la Pentecôte : « Tournons nos yeux vers l’Hôte intérieur, car il habite nos silences et nos prières ».
CHAPITRE 21 : DES DOYENS DU MONASTÈRE.
Mercredi 28 juin :
Le sujet de ce chapitre, où saint Benoît prévoit que, lorsque la communauté est nombreuse, l’abbé pourra choisir des doyens pour le seconder dans sa charge, concerne plus particulièrement les grandes communautés, ce qui est moins le cas aujourd’hui et dans beaucoup d’endroits !
Il reste que peut se poser la question du choix, par l’abbé, de frères qui puissent l’aider dans sa charge. Ceux-ci doivent avoir un bon témoignage de vie monastique, car c’est pour aider les frères de la communauté à marcher selon la Règle qu’ils doivent être choisis. Ils doivent aimer les frères, vivre eux-mêmes selon Dieu et marcher dans l’obéissance et l’humilité selon la Règle. C’est par cette humilité et cette ouverture à la grâce que Dieu peut venir habiter en nous.
Éventuellement, ils peuvent aussi être appelés à enseigner en témoignant par leur vie et par leurs paroles.
CHAPITRE 22 : COMMENT DORMENT LES MOINES.
Jeudi 29 juin, solennité des saints Pierre et Paul :
Le temps du sommeil et de la nuit est présenté ici comme une continuité avec le jour et non comme une rupture. Même si les conditions actuelles ne sont plus les mêmes qu’au temps de saint Benoît, notamment avec les cellules individuelles qui ont remplacées le dortoir, la nuit apparaît toujours comme un temps de solitude, un temps d’intimité avec le Seigneur ; et même si la communauté reste proche, chacun se retrouve face à Dieu. C’est aussi un temps de veille, comme dit le Cantique des Cantiques : « Je dors mais mon cœur veille ».
Certains détails rappellent cette vigilance : la lampe qui reste allumée dans le dortoir (cf. la parabole des dix jeunes filles), la ceinture aux reins qui rappelle la première Pâque célébrée en Égypte, la disponibilité pour l’œuvre de Dieu… On peut aussi penser à l’apôtre Pierre, fêté aujourd’hui, réveillé et libéré de sa prison par l’ange qui lui dit : « Mets ta ceinture et chausse tes sandales » (Act. 12, 8).
Ce chapitre prolonge en quelque sorte ceux sur l’office en développant l’attitude qu’il faut garder en dehors de l’office, notamment pendant la nuit. Il ne doit pas y avoir de rupture entre la prière et les autres activités, même pendant le repos, la nuit étant un rappel de la nuit pascale.
CHAPITRE 23 : DE L’EXCOMMUNICATION POUR LES COULPES.
Vendredi 30 juin :
De ce chapitre, le premier de l’ensemble qui traite de l’excommunication, on peut retenir deux points : D’abord l’excommunication – on pourrait dire l’exclusion – est le fait de celui-là même qui est en cause, plutôt qu’un châtiment imposé par le supérieur ou la communauté, car le coupable peut, par son attitude critique ou murmuratrice s’en séparer. En effet, il la juge en se croyant meilleur que tous les autres. Nous même pouvons connaître des moments où nous sommes tentés par cette attitude ; il nous faut alors écouter les appels à l’humilité et à la réconciliation.
Ensuite, le châtiment imposé au coupable a une valeur médicinale plus que disciplinaire car il est précédé d’avertissements inspirés par la miséricorde. Si le coupable refuse de les écouter, on doit en venir alors à l’excommunication pour que cette mesure puisse l’amener à revenir dans la communauté. L’exclusion définitive sera un dernier recours ; mais elle est heureusement rare ; ou alors, c’est le coupable qui partira de lui-même.
CHAPITRE 24 : QUELLE DOIT ÊTRE LA MESURE DE L’EXCOMMUNICATION.
Samedi 1er juillet :
Lorsqu’un frère se rend coupable d’une faute, il est d’abord prévu par saint Benoît, des avertissements. Mais s’il ne se corrige pas, une sanction qui est laissée à l’appréciation de l’abbé en fonction de la qualité de la faute, doit s’appliquer.
L’excommunication, ou l’exclusion de la communauté pour un temps, est liée à la faute et elle lui est proportionnée. C’est un temps de solitude qui est imposé au frère coupable par une mise à l’écart de la table et de l’oratoire. Ce retrait par rapport à la communauté a une visée thérapeutique et doit permettre une prise de conscience de sa faute par le coupable. A partir de là, sa conversion peut s’opérer pour, qu’après le temps nécessaire, le pardon puisse être obtenu.
Frère Claude
Prieur du Bec