Dimanche 7 mai :
Tous ces passages du Prologue où il est question de ‘’demeurer sous la Tente du Seigneur, d’habiter dans Sa Maison’’, comme le disent les psaumes 14, cité ici, avec le 26 et le 83, tous ces passages rejoignent le chapitre 14 de l’Évangile de saint Jean où Jésus dit à ses disciples : « Il y a de nombreuses demeures dans la maison de mon Père ». Autrement dit, son désir est de nous faire partager l’amour qui l’unit à son Père et qu’ils ont tous les deux pour nous dans l’Esprit-Saint.
Mais pour parvenir à ce bonheur que Jésus désire nous donner, il faut passer par Lui en l’accueillant, faire sa volonté et marcher à sa suite en passant par sa croix. Et saint Benoît nous exhorte à ne pas attendre, à nous hâter au contraire pour le suivre. C’est donc chaque jour qui est le moment favorable pour revenir à Dieu le Père en marchant à la suite de son Fils. Et comme nous dit encore saint Benoît, il nous faut nous hâter « de faire maintenant ce qui doit nous avancer pour l’éternité », c’est-à-dire aimer, car l’amour ne passe jamais.Lundi 8 mai :
« Nous allons donc fonder une école du service du Seigneur » nous dit saint Benoît à la fin de son Prologue. C’est une invitation à suivre le Seigneur pour répondre à l’appel de Dieu. Car le désir de Dieu est de donner sa Vie à ses enfants, de leur donner le bonheur. Le péché nous avait éloignés de Lui, mais il est toujours temps de revenir à Lui et de nous convertir. Saint Benoît nous y exhorte avec insistance, tout en respectant notre liberté d’accepter ou non cet appel.
Mais à tous ceux qui répondent à cette invitation divine, saint Benoît propose des moyens qu’il va développer tout au long de sa Règle. Et si nous suivons fidèlement ce programme, si nous acceptons de vivre avec le Christ toutes les contradictions, difficultés et misères douloureuses de la vie, nous pourrons avoir part à son Règne.
Jésus ne nous donne pas de recettes toutes faites, valables en toutes circonstances, mais il nous enseigne un art bien plus difficile, l’art d’apprendre, de discerner la trace de Dieu dans la masse des événements et des réalités de notre quotidien.
CHAPITRE 1 : DES GENRES DE MOINES.
Mardi 9 mai :
Saint Benoît peut maintenant développer sa pensée, une pensée nourrie d’expérience. Sa Règle s’adresse à des moines qui vivent en communauté et pratiquent la vie cénobitique. Mais en introduction, il mentionne les différents genres de moines, autres que les cénobites : les ermites, les sarabaïtes et les gyrovagues, ces deux dernières catégories étant plutôt mal vues, même si à l’origine elles étaient reconnues.
Quant à ceux qui pratiquent la vie solitaire, ou vie érémitique, qui n’est pas donnée à tous, ils ne le peuvent vraiment qu’après « une longue probation dans un monastère », c’est-à-dire après avoir mené la vie cénobitique. Sinon, on risque de tomber plus ou moins dans une des deux catégories mal vues précédentes.
La vie communautaire permet une dépossession de soi pour pouvoir s’ouvrir à Dieu et aux autres. Il faut renoncer à sa volonté propre pour suivre le Christ. Le combat spirituel, commencé en communauté, peut se poursuivre dans la solitude, avec l’aide de Dieu. Mais la vie cénobitique suppose aussi une part d’érémitisme, de solitude. C’est ce qui permet de persévérer en s’appuyant sur Dieu sans s’écrouler dès la première épreuve.
Mercredi 10 mai :
Saint Benoît fait un portrait peu flatteur des sarabaïtes et des gyrovagues qui sont deux genres de moines très différents de ce que nous essayons de vivre en communauté.
Mais si nous réfléchissons sur ces deux genres, nous pouvons discerner qu’il peut se glisser dans notre vie de cénobitique, dans notre manière d’être, certains de leurs traits comme celui du désir, l’instabilité ou une certaine mollesse, etc… Il n’y a jamais de frontière franche et étanche entre tous ces différents genres de moines !
Aussi, c’est chaque jour que nous devons recommencer à nous mettre en marche à la suite du Seigneur, à renoncer à nous-mêmes et à notre volonté propre pour lui appartenir entièrement.
CHAPITRE 2 : DE L’ABBÉ.
Jeudi 11 mai, fête des saints abbés de Cluny :
Lorsqu’à l’occasion du dimanche du Bon Pasteur, nous chantons l’antienne : Ego sum Pastor ovium, c’est pour signifier que l’abbé est chargé d’une mission pastorale. Il est chargé de veiller sur un troupeau, la communauté qui lui est confiée, en s’inspirant de l’Unique Pasteur, le Seigneur Jésus.
« Qu’il répande ses ordres et sa doctrine dans l’esprit des disciples comme un ferment de divine justice » nous dit saint Benoît pour l’abbé. Ce qu’il enseigne, ce sont les enseignements mêmes du Seigneur, et il doit le faire par sa parole, mais aussi par ses actes, afin que les disciples, à son exemple, soient encouragés sur la voie de l’obéissance ; obéissance qui, en réalité, est rendue à Dieu.
Aujourd’hui, en fêtant les saints abbés de Cluny, nous avons des exemples d’abbés dont le rayonnement s’est étendu bien au-delà de leur abbaye et même de l’ordre de Cluny ; sur toute l’Église de leur temps.
Vendredi 12 mai :
L’abbé, chez saint Benoît, doit montrer à ses frères le chemin à prendre à la suite du Christ. Et comme saint Benoît le rappelle souvent dans la Règle, l’abbé doit prêcher autant par sa parole que par ses actes ; il doit toujours y avoir une cohérence entre son ‘’dire’’ et son ‘’faire’’. Le modèle, c’est le Christ qui marche vers sa Pâque. Tout son enseignement, dans le discours après la Cène, ratifie son ministère : annoncer l’amour du Père pour tous les hommes, c’est ce que lui-même accomplit dans son offrande totale.
Samedi 13 mai :
Dans le passage d’aujourd’hui sur l’abbé, saint Benoît parle de la relation de l’abbé avec ses frères où « l’un ne doit pas être aimé plus que l’autre ». Et encore : « Que la charité de l’abbé soit donc égale pour tous ». La raison en est que tous, nous sommes égaux dans l’amour du Christ. Appelés par Lui pour son service, Jésus nous dit aujourd’hui : « Le serviteur n’est pas plus grand que son Maître » et encore : « Je vous ai choisis en vous prenant dans le monde, pour que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure ».
C’est bien ce que nous vivons dans le monastère puisque nous y avons été appelés comme les disciples de l’Évangile pour le suivre. Et comme il leur a dit à plusieurs reprises dans le discours après la Cène, Jésus nous redit aujourd’hui : « Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres, comme je vous ai aimé ». Mais la charité du Christ que l’abbé doit avoir pour ses frères, ceux-ci doivent la partager aussi entre eux.
Frère Claude
Prieur du Bec