Je propose de commencer par un petit exercice : lire cet article sans parler, et sans source de bruit extérieur.
Comment faire silence dans le monde d’aujourd’hui, un monde de bruits, de flashs, de coups, de claquement de portes, de cris….: pas facile !!
Faire silence… L’objectif n’est pas le silence pour lui-même mais ce qu’il va engendrer comme écoute. Écoute de celui qui nous parle (Dieu…). On ne peut entendre si on ne se tait pas. Dieu ne parle que si son serviteur écoute…Faire silence…, ce n’est pas demander aux autres de se taire, même si… cela leur ferait peut être du bien… Et, si, pour faire silence, nous commencions nous mêmes par nous taire, ne pas faire de bruit, c’est à dire nous laisser habiter par ce qui nous manque.
On peut être en silence, physiquement, mais si notre tête continue à brasser des idées, à faire la liste de tout ce qu’on a oublié de dire, de faire, d’envoyer… alors, pas d’écoute !
L’agitation de nos pensées peut se comparer à la tempête qui secoua la barque des disciples sur la Mer de Galilée alors que Jésus dormait. À nous aussi, il arrive d’être perdus, angoissés, incapables de nous apaiser nous-mêmes. Mais le Christ est capable de venir à notre secours. De même qu’il menaça le vent et la mer et qu’il « se fit un grand calme », il peut calmer notre cœur quand il est agité par la peur et les soucis (Marc 4).
Faisant silence, nous mettons notre espoir en Dieu. Un psaume suggère que le silence est même une forme de louange. Nous lisons habituellement le premier verset du Psaume 65 : « La louange te convient, ô Dieu ». Cette traduction suit la version grecque, mais l’hébreu se lit dans la plupart des Bibles : « Le silence est louange pour toi, ô Dieu. » Quand cessent les paroles et les pensées, Dieu est loué dans l’étonnement silencieux et l’admiration.
Faire silence, c’est aussi être capable de se déconnecter des technologies, qui, pour finir, peuvent nous isoler.
On peut regarder sa télévision, sans pour autant l’allumer… (rire), le portable n’a pas toujours besoin d’être emporté… Regarder silencieusement un coucher de soleil, un paysage, des animaux, une forêt, peut nous rapprocher de la création et de l’essentiel.
Le Christ dit : « Voici quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jean 15,12). Nous avons besoin de silence pour accueillir ces paroles et les mettre en pratique. Quand nous sommes agités et inquiets, nous avons tant d’arguments et de raisons pour ne pas pardonner et ne pas aimer trop facilement.
Mais quand nous tenons « notre âme en paix et silence », ces raisons s’évanouissent. Peut-être évitons nous parfois le silence, lui préférant tout bruit, des paroles ou des distractions quelles qu’elles soient, parce que la paix intérieure est une affaire risquée : elle nous rend vides et pauvres, elle dissout l’amertume et les révoltes et nous conduit au don de nous-mêmes. Silencieux et pauvres, nos cœurs sont conquis par l’Esprit Saint, emplis d’un amour inconditionnel. De manière humble mais certaine, le silence conduit à aimer.
S’il n’y avait pas de silence en musique, la musique ne pourrait pas respirer…
S’il n’y avait pas de silence dans une classe, le professeur ne pourrait pas enseigner et l’élève ne pourrait pas apprendre.
S’il n’y avait pas de silence dans un hôpital, le malade ne pourrait pas se reposer.
s’il n’y avait pas de silence… etc.
Volontairement, je n’ai pas parlé des prêtres, des moines, des sœurs, des oblats etc…, car le silence n’est pas réservé à quelques uns qui vivent une vocation spéciale, il est bon pour tous et pour chacun, qui que nous soyons…
Le bien ne fait pas de bruit, et le bruit ne fait pas de bien.
Antoine LEVEE
Oblat du Bec (OSB)