Commentaires de la Règle de saint Benoit – S8

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Catégorie : Vie monastique

CHAPITRE 16 : COMMENT, DE JOUR, SE CELEBRENT LES OFFICES DIVINS.

 

Dimanche 20 juin :

L’idée maîtresse de ce chapitre est que le temps ne nous appartient pas. Il appartient à Dieu qui nous le donne pour que nous en fassions un bon usage. C’est pourquoi la journée est jalonnée par les offices qui sont l’occasion de célébrer la grandeur de Dieu et son amour qui nous entoure et nous protège à tout moment de notre existence, de jour comme de nuit. Notre louange ne doit pas s’interrompre.

C’est le sens des citations du psaume 118 : « Sept fois le jour, j’ai proclamé ta louange » et « Au milieu de la nuit, je me levais pour te célébrer ». Le chiffre sept est à prendre ici, non pour sa valeur arithmétique, matérielle si l’on peut dire, mais pour sa valeur symbolique. Dans la Bible – et il s’agit bien ici d’une citation biblique – le chiffre ‘’sept’’ a le sens d’une plénitude (comme le chiffre 12, ou les 144 000 élus de l’Apocalypse qui représentent la totalité et non une partie excluant le reste).

Qu’il y ait 2, 3, 5 ou 7 offices, importe peu. Le sens est ici que la totalité de la journée soit sanctifiée et offerte à Dieu. Les temps intermédiaires entre les offices sont toujours vécus en sa présence, et dans la prière du cœur qui s’exprime dans le silence, comme par la prière chantée. Bien sûr, il est bon et nécessaire qu’il y ait des moments consacrés exclusivement à la liturgie, à l’office choral ; mais la prière doit irriguer toutes nos activités de la journée comme de la nuit, dans notre travail comme dans le repos.CHAPITRE 17 : COMBIEN DE PSAUMES CHANTER A CES MÊMES HEURES.

 

Lundi 21 juin :

Après avoir organisé les Vigiles et les Matines (ou Laudes), saint Benoît donne la structure des autres offices de la journée jusqu’au soir.

Ce qu’il faut surtout retenir, c’est que la journée est rythmée par ces temps de prière commune. C’est à la fois une rupture avec les occupations de la journée pour nous tourner vers Dieu, et aussi une offrande de ces mêmes occupations de la journée pour qu’elles soient sanctifiées. Le travail, dans sa variété, nous fait participer à l’œuvre de la création.

On remarque aussi que les offices de Laudes et de Vêpres, plus solennels, marquent le passage de la nuit au jour, et du jour à la nuit ; l’un étant le temps de l’activité, l’autre celui du recueillement et du repos. Cette différence était plus marquée à une époque où l’on vivait davantage au rythme de la nature et du cosmos qu’aujourd’hui. Mais, malgré cette influence de la société moderne, il nous faut veiller à respecter cette alternance.

 

CHAPITRE 18 : EN QUEL ORDRE IL FAUT DIRE LES PSAUMES.

 

Mardi 22 juin :

Saint Benoît entre dans le détail de la répartition des psaumes pour les différents offices de la journée et de la semaine. Certains psaumes sont répétés plusieurs jours de suite. C’est le cas des psaumes des montées, psaumes de pèlerinage, attribués aux petites heures du jour. Ils évoquent le grand pèlerinage des vivants vers la Jérusalem céleste.

La mention du psaume 20e qui doit ouvrir les Vigiles du dimanche rappelle que c’est le Seigneur ressuscité qui est célébré. En effet, le psaume 20e exalte la victoire du roi. On peut le lire comme la célébration de la victoire du Christ au matin de Pâques. C’est là un signe du caractère pascal de l’office.

 

Mercredi 23 juin :

Une coïncidence de calendrier nous fait entendre à l’office de ce matin, le récit de la vocation du prophète Samuel (I Sam. 3, 1-29) juste avant la fête de la nativité de saint Jean-Baptiste. Les lectures de la fête nous proposeront des récits de vocations prophétiques : Jérémie, le second chant du Serviteur au livre d’Isaïe, pour nous préparer ainsi à célébrer le dernier et le plus grand des prophètes : saint Jean-Baptiste. Sa venue prépare directement celle de Jésus.

Tous ces récits nous redisent l’appel de Dieu. C’est Dieu qui choisit des hommes pour parler en son nom, pour révéler sa présence au milieu de leurs frères et pour les ramener sur le bon chemin, celui qui conduit à Dieu par une vraie conversion. Telle est la mission des prophètes ; telle celle de Jean-Baptiste. C’est aussi celle de tous ceux que le Seigneur appelle à son service pour toutes sortes de missions. Ils sont envoyés pour être ses témoins.

C’est aussi notre vocation : témoigner de la présence du Royaume de Dieu au milieu des hommes. Par notre baptême, nous avons reçu une vocation prophétique, dans le sens où elle parle aux hommes au nom de Dieu, même si nous n’allons pas prêcher à l’extérieur. Le seul témoignage de notre vie peut beaucoup dire aux hommes quelque chose de la présence et de l’amour de notre Père pour chacun.

 

Jeudi 24 juin :

L’office des Vêpres est le pendant de l’office des Laudes. Ces deux moments de la liturgie des heures marquent la journée en s’adaptant au rythme cosmique : sortie de la nuit, et entrée dans la nuit. Les Vêpres sont le moment où l’âme se recueille après les activités de la journée pour entrer dans le silence et le mystère de la nuit.

La nuit est le temps où Dieu parle au cœur, où il agit. Qu’on se rappelle les grandes nuits bibliques : nuit de la Création, nuit de l’alliance avec Abraham, nuit de l’Exode, nuit de Noël et nuit de Pâques.

Traditionnellement, on commençait toujours l’office de Vêpres par les psaumes. La liturgie des heures l’introduit aujourd’hui par l’hymne. C’est un chant qui rassemble la communauté et fait son unité en même temps qu’il donne le ton à la célébration du jour (temps liturgique propre ou fête d’un saint) avant de chanter les psaumes qui sont parole de Dieu et de lire un texte de l’Ecriture. Le cantique évangélique nous unit à l’action de grâce de Marie et l’intercession nous associe à l’Eglise et aux hommes que nous portons dans notre prière.

Nous exerçons ainsi notre vocation et notre devoir ecclésial en intercédant pour tous, sachant que la prière de l’office n’est pas réservée exclusivement aux religieux et aux clercs, mais qu’elle est le bien de tous les baptisés.

 

Vendredi 25 juin :

Saint Benoît vient d’établir la composition des offices du jour. Avec ceux de la nuit, l’ensemble de tous les offices est ainsi organisé.

Nous pensons souvent que c’est grâce au Concile Vatican II qu’a été possible une réforme de la liturgie des heures, avec notamment une adaptation dans la structure des offices eux-mêmes ainsi que dans la répartition des psaumes.

Or, on voit que cette souplesse existe déjà chez saint Benoît. Il avertit « expressément que, si cette distribution des psaumes ne convient pas à quelqu’un, il peut établir un autre ordre qu’il jugera meilleur, pourvu toutefois que chaque semaine le psautier soit chanté en entier » dans la semaine. Saint Benoît ne prétend donc pas imposer un ordre absolu et définitif. Ce qui est premier, c’est la louange, la prière dont les psaumes nous offrent différents aspects. Benoît a fait une proposition, mais c’est pour un service, le service divin. On appelle souvent l’ensemble des différents offices de la journée : « Opus Dei », l’œuvre de Dieu. C’est pourquoi, pendant longtemps, cet ordre proposé dans la Règle, est resté le même. Et c’était le même pour tous les prêtres et les religieux.

L’important n’est pas que l’office soit une performance à accomplir ; il doit jalonner nos journées, nos semaines. Il permet la sanctification du temps et les heures fixes sont un bon moyen de parvenir à ce but.

 

CHAPITRE 19 : DE LA DISCIPLINE DU CHANT.

 

Samedi 26 juin :

Quand saint Benoît parle de la discipline du chant – c’est du moins le titre qui est donné à ce chapitre – il ne se place pas tant du point de vue technique que du point de vue de l’attitude intérieure que nous devons avoir à l’office.

Cependant, l’aspect technique n’est pas à négliger. Il concerne d’abord toute la préparation des offices ainsi que notre attention au chant lui-même : reprise des antiennes par exemple (on croit pouvoir chanter de mémoire !), attention les uns aux autres pour veiller au rythme d’ensemble. Il y a une complémentarité entre les solistes et le chœur qui favorise l’unité de l’ensemble. Mais cet aspect ne suffit pas car notre attitude intérieure reste fondamentale. Nous sommes en présence de Dieu, Jésus est au milieu de nous, aussi notre chant, notre attention les uns aux autres doivent être l’expression de notre conscience est en présence de Dieu. Plusieurs citations de psaumes expriment cette attitude intérieure pendant la célébration de l’office divin : crainte et humilité, adoration et jubilation. Le chant des psaumes est une prière adressée à Dieu avec les paroles reçues de lui.

 

Père Claude
Prieur du Bec