Commentaires de la Règle de saint Benoit – S7

CHAPITRE 10 : COMMENT SE CELEBRE EN ETE LA LOUANGE NOCTURNE.

 Dimanche 13 juin :

Frère Claude a lu au Chapitre le texte suivant : ‘’La Pâque hebdomadaire des chrétiens1 ’’.

«Après la Pentecôte, l’année liturgique entre dans le temps ordinaire, qui correspond au cours de l’année hors des temps privilégiés de l’Avent et de Noël, du Carême et du temps pascal. Les solennités de la Sainte Trinité et du Saint-Sacrement précèdent le retour des dimanches du temps ordinaire, en latin per annum. Il ne faut pas y  voir pour autant que ces dimanches seraient ordinaires car, en liturgie, il n’y a pas de dimanche ordinaire. ‘’En vertu d’une tradition apostolique dont l’origine remonte jusqu’au jour même de la résurrection du Christ, l’Eglise célèbre le mystère pascal chaque huitième jour, qui est nommé à juste titre jour du Seigneur ou jour dominical2.’’

Célébrer Pâques, ce fut d’abord célébrer le dimanche. ‘’Aussi le jour dominical est-il le jour de fête primordial qu’il faut proposer avec insistance à la piété des fidèles […], il est le fondement et le noyau de toute l’année liturgique3.’’ A l’exception de quelques grandes solennités et des fêtes du Seigneur, rien ne peut l’emporter sur la célébration du cycle des dimanches. Il faut en effet attendre le IIe siècle pour voir apparaître une fête annuelle de Pâques, dont la date ne sera définitivement fixée qu’au Concile de Nicée, en 325.

Deux interdits soulignent la dimension pascale du dimanche. Avant le développement du triduum pascal, la rupture du jeûne, à la fin de la vigile, marque l’entrée dans la fête. Puisque le dimanche, c’est Pâques, il est interdit de jeûner ce jour-là, tout comme durant les cinquante jours du temps pascal. Quant au 20e canon du concile de Nicée, il est prescrit de prier debout les dimanches alors que certains avaient pris l’habitude de ‘’fléchir le genou le dimanche et pendant les jours de la Pentecôte’’. Debout, l’assemblée dominicale célèbre la victoire du Seigneur ressuscité et préfigure la foule immense des sauvés qui se tient debout devant le Trône et devant l’Agneau pour la liturgie céleste (Ap. 7,9).

La constitution sur la liturgie parle du dimanche, premier jour, comme d’un huitième jour, faisant ainsi écho aux apparitions du Ressuscité aux disciples le soir même de la résurrection et huit jours après (Jn. 20, 19-26). Saint Justin propose une autre signification : ‘’Nous nous assemblons tous le jour du soleil, parce que c’est le premier jour où Dieu, tirant la matière des ténèbres, créa le monde, et que, ce même jour, Jésus-Christ notre Sauveur ressuscita des morts.’’ Le dimanche fait donc mémoire à la fois de l’œuvre de la création depuis le commencement du monde, et de la résurrection, premier jour de la nouvelle création. »

  • Dans la revue ‘’Magnificat’’ de juin 2021, article du père Gaëtan Baillargeon, prêtre canadien et docteur en théologie et en histoire des religions.
  • Constitution sur la sainte liturgie, n° 106.

 

CHAPITRE 11 : COMMENT SE CÉLÈBRE LES VIGILES DU DIMANCHE.

 

Lundi 14 juin :

Frère Claude reprend un nouveau passage du même article cité hier sur : ‘’Le psautier de la liturgie des Heures ‘’.

« La liturgie des Heures des dimanches célèbre aussi la résurrection du Christ. La présentation générale de la Liturgie des Heures nous indique que : ‘’ Pour le dimanche, même à l’office de lecture et à l’heure médiane, on a choisi les psaumes qui, selon la tradition, sont particulièrement capables d’exprimer le mystère pascal.’’ Un titre, une citation du Nouveau Testament ou des Pères de L’Eglise et une antienne précèdent chaque psaume ou cantique pour l’interpréter à la lumière du Christ. Les dimanches, ils permettent de nous faire entrer dans la dimension pascale de la liturgie des Heures.

Notons la place privilégiée accordée au psaume 117 ; il chante au verset 22 : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle. Ce verset, Jésus le cite dans la parabole des vignerons homicides comme une annonce prophétique de sa Pâque (Mt. 21, 42). Pierre le cite aussi devant le grand conseil de Jérusalem pour annoncer la résurrection de Jésus (Ac. 4, 11), et la 1er lettre de Pierre le reprend en parlant du baptême (I P. 2,7). Il s’agit bien du psaume pascal par excellence, et on le retrouve tous les dimanches, en alternance à l’office du matin ou du milieu du jour. »

 

CHAPITRE 12 : COMMENT CÉLÉBRER LA SOLENNITÉ DES MATINES.

 

Mardi 15 juin :

L’office appelé ici Matines correspond pour nous à l’office des laudes. C’est la louange du matin.

Le dimanche en particulier, cet office a un caractère pascal très marqué. Si l’on suit le cursus des psaumes proposé par saint Benoît, on constate une dynamique pascale, un passage de la mort à la résurrection, déjà perceptible dans le psaume 50, le Miserere, où l’homme pêcheur passe de l’état de la prostration à la joie d’être sauvé, au bonheur de chanter la louange du Seigneur. C’est aussi dans ce psaume qu’on trouve la prière chantée chaque matin au début de l’office des laudes : « Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche publiera ta louange ».

Puis aussi, entre autres, le psaume 117, psaume pascal par excellence, qui est chanté aux Rameaux et à Pâques. La présence de l’Alléluia renforce aussi son caractère pascal. Enfin, le Benedictus complète cette dimension. L’évocation du ‘’Soleil levant’’, en plus de la correspondance avec le début de la journée, est un rappel de la résurrection du Seigneur.

Même si le choix des psaumes est aujourd’hui un peu différent de celui proposé par saint Benoît, nos laudes du dimanche ont bien évidemment gardé ce caractère pascal.

 

CHAPITRE 13 : LES JOURS ORDINAIRES, COMMENT CÉLÉBRER LES MATINES.

 

Mercredi 16 juin :

Frère Claude commence par un commentaire de Matthieu 6, 1…18 :

L’évangile d’aujourd’hui est le même que celui du mercredi des Cendres, avec l’insistance de Jésus sur la discrétion à propos de trois actes : l’aumône, la prière et le jeûne. Ces trois points touchent notre être dans sa triple relation : relation à l’autre, à Dieu et à soi-même. Notre amour est don de soi aux autres, c’est le sens de l’aumône, offrande de soi à Dieu par la prière qui vient du cœur, amour de soi-même par la maîtrise exercée sur ses désirs. Ces trois dimensions de notre amour sont unies entre elles. La maîtrise de soi par le jeûne et le renoncement purifient le cœur et le libèrent pour Dieu ; l’amour du prochain peut alors s’exercer de façon désintéressée.

Le cœur ainsi libéré et offert peut se tourner vers Dieu dans une prière humble et sincère, où l’on ne cherche pas la satisfaction d’être remarqué. De telles dispositions nous aident à vivre l’office divin en étant présent de cœur et d’esprit, sans nous laisser envahir par l’ennui et la monotonie due à la répétition dans la liturgie. Du moins on essaye de le vivre ainsi.

Jeudi 17 juin :

Dans la dernière partie de ce chapitre 13, l’insistance est mise sur la prière du Seigneur, le Notre Père, qui conclut chaque office.

Nous rejoignons l’évangile de ce jeudi (Mat. 6,) qui est justement le don de cette prière par Jésus à ses disciples, et dont la première partie nous situe à notre juste place en nous tournant vers Dieu. Nous le reconnaissons comme Saint et comme Seigneur avec la révérence qui lui est due, mais dans une relation de confiance, d’amour qui fait de nous ses enfants. C’est la grande nouveauté apportée par Jésus. Il est le Fils et fait ainsi de nous ses frères.

La seconde partie du Notre Père nous établit justement dans la relation fraternelle. Le pain que nous demandons pour chaque jour, et pour chacun, c’est le don de la vie. C’est aussi le lien fraternel menacé par le péché et qui doit être rétabli par le pardon mutuel, à l’exemple du pardon offert par Dieu lui-même et par le Christ. Enfin, nous demandons le soutien et la force de Dieu pour résister aux assauts du mal, notamment dans le combat pour la foi.

Jésus insiste sur le pardon des offenses, condition pour être pardonné et rétabli dans la relation filiale. Saint Benoît fait de même en donnant à la prière du Notre-Père, à la fin de l’office, une valeur purificatrice et de réconciliation car, dans la vie quotidienne, il peut toujours y avoir des heurts, des querelles et des divisions. Le Notre-Père prononcé par le supérieur au nom de tous a une valeur sacramentelle. Rappelons-nous l’un des derniers instruments des bonnes œuvres : « Rentrer en paix avant le coucher du soleil quand on a eu un désaccord avec son prochain (Chap. 4, verset 73) ».

 

CHAPITRE 14 : AUX FÊTES DES SAINTS, COMMENT CELEBRER LES VIGILES.

 

Vendredi 18 juin :

Il y a dans les fêtes des saints différents degrés. Beaucoup sont célébrées comme mémoire, quelques une comme fêtes, et certaines comme solennités. La Vierge Marie qui a le plus de mentions dans l’année, est honorée sous ces trois formes : quelques solennités comme l’Annonciation ou l’Assomption, quelques fêtes comme la Visitation, et plusieurs mémoires, surtout quand il s’agit de titres particuliers. Pour les autres saints, il y a quelques solennités (saint Jean-Baptiste, saints Pierre et Paul…), plusieurs fêtes et des mémoires.

Pour les fêtes et les solennités, le choix des psaumes et des lectures a un caractère propre, adapté au saint concerné. Si la liturgie a besoin d’un cadre précis, d’un ordre et d’un déroulement réglés, il n’en reste pas moins qu’elle demande une certaine cohérence dans le choix des psaumes par exemple ou des lectures, un choix qui correspond à l’esprit de la fête que l’on célèbre. On ne chantera pas un psaume de détresse pour la solennité de l’Annonciation par exemple. C’est ce que saint Benoît avait compris en préconisant de célébrer les fêtes de saints comme un dimanche. C’est un des mérites de la réforme conciliaire de permettre une plus grande souplesse pour la célébration des fêtes et de la liturgie en général.

L’essentiel est de toujours célébrer le mystère du Christ ressuscité, et dont la vie se communique à tous ceux qui l’ont suivi, et se sont offerts à lui. Célébrer les fêtes des saints, c’est célébrer le mystère du Christ ressuscité auquel les saints participent déjà.

 

CHAPITRE 15 : L’ALLÉLUIA : EN QUELS TEMPS IL FAUT LE DIRE.

 

Samedi 19 juin :

     L’Alléluia souligne la dimension pascale de l’office divin. On le chante toute l’année, sauf en Carême, avec certains psaumes en semaine et aux offices du dimanche qui est le jour de la résurrection. Au temps pascal, l’Alléluia accompagne tous les psaumes et les répons.

Le chant de l’alléluia au cours de l’office signifie que nous rappelons et célébrons la résurrection du Christ. Nous anticipons la liturgie céleste telle qu’on la voit déjà dans l’Apocalypse. Notre vie, et la vie du chrétien en général, nous introduit déjà dans la vie nouvelle inaugurée par la résurrection du Seigneur.

 

 

Père Claude
Prieur du Bec