CHAPITRE 3 : DE L’APPEL DES FRÈRES EN CONSEIL.
Dimanche 16 janvier :
Ce chapitre sur l’appel des frères en conseil met en lumière un aspect de notre vie qui peut nous sembler évident mais qu’il nous faut toujours vérifier : c’est l’organisation de la vie communautaire. Nous ne sommes pas une juxtaposition d’individus, des solitaires qui se retrouvent ensemble à certains moments, comme pour les offices ou les repas. Bien sûr, notre vie comporte une certaine part de solitude pour nous retrouver avec le Seigneur ou avec nous-mêmes. Mais nous devons aussi nous porter les uns les autres, selon le mot de saint Paul : « Portez les fardeaux les uns des autres et accomplissez ainsi la Loi du Seigneur (Gal. 6, 2) », car nous participons au même Corps, nous avons une destinée commune, des projets, une organisation, des soucis à partager, à porter ensemble.
C’est pourquoi l’écoute mutuelle a son importance et il est bon d’écouter les avis de chacun. Cela demande une sortie de soi en donnant son point de vue sur tel ou tel sujet, mais humblement selon saint Benoît qui précise : « avec toute la soumission de l’humilité », et en acceptant que son avis ne soit pas un absolu, mais soit corrigé, tempéré par celui des autres. On progresse ainsi dans l’écoute mutuelle pour finalement accepter que la décision, sur des sujets importants, soit prise par l’abbé qui aura pu écouter et discerner ce qui est le meilleur pour l’ensemble du corps.
Écoute, humilité, fraternité, telles sont les valeurs qui sont mises ici en lumière.Lundi 17 janvier :
De cette seconde partie sur le conseil des frères, on peut retenir ces paroles de saint Benoît : « Que tous les frères suivent la Règle en toutes choses, comme la maîtresse » et : « Personne, dans le monastère, ne doit suivre la volonté de son propre cœur ». Saint Benoît rappelle aussi pour l’abbé : « Fais tout avec conseil, et après l’événement tu n’auras pas à te repentir », conseil biblique tiré du Siracide (Si. 32, 19) qui peut être bon pour tous.
CHAPITRE 4 : QUELS SONT LES INSTRUMENTS DES BONNES ŒUVRES.
Mardi 18 janvier, entrée dans la semaine de prière pour l’unité entre chrétiens :
La semaine œcuménique a été préparée cette année par le Conseil des Églises du Moyen-Orient dont le siège est à Beyrouth. Ils ont choisi comme texte conducteur la citation de l’évangile de saint Matthieu dans l’épisode de la venue des Mages : « Nous avons vu son astre à l’Orient et nous sommes venus lui rendre hommage ». (Mt. 2, 2).
Voici deux extraits du texte de présentation :
« Les Mages nous révèlent l’unité entre toutes les nations voulue par Dieu. Ils viennent de pays lointains et représentent des cultures diverses, mais ils sont poussés par la même faim de voir et de connaître le roi nouveau-né et sont réunis dans l’étable de Bethléem pour simplement rendre hommage et offrir des dons. Les chrétiens sont appelés à être un signe pour le monde que Dieu a créé, afin de réaliser cette unité qu’il désire [..] Le peuple de Dieu a donc pour mission d’être un signe comme le fut l’étoile, de guider l’humanité dans sa quête de Dieu, de conduire tous les êtres au Christ, et d’être l’instrument par lequel Dieu réalise l’unité de tous les peuples. »
Mercredi 19 janvier :
Ce chapitre 4 de la Règle est bien connu. On pourrait voir dans cette longue énumération quelque chose de forcé : comment a-t-on pu trouver 74 instruments de l’art spirituel ? S’il ne s’agissait que d’une sagesse humaine, on pourrait les trouver ennuyeux. En fait, le ton est donné dès le début, car ils s’enracinent dans cette source qu’est l’Écriture. Les deux premiers instruments ne sont autres que les deux commandements sur lesquels repose la Loi donnée à Israël et qui sont réaffirmés par Jésus dans l’Évangile : c’est le double commandement de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain. Tous les autres instruments en sont un développement, une application à la vie concrète. Que ce soient des exhortations ou des interdictions, il s’agit toujours d’encouragements à ne pas vivre selon le monde, mais à vivre selon l’appel qui nous a été lancé par le Christ, appel à la conversion et à vivre en hommes nouveaux ; appel à vivre non selon la chair, mais selon l’Esprit d’après la distinction qu’établit saint Paul dans ses différents épitres (Romains, galates, Éphésiens).
Tout chrétien, et donc le moine, est appelé à se laisser guider par l’Esprit-Saint qui le renouvelle.
Jeudi 20 janvier :
Alors que les instruments des bonnes œuvres de ces deux premières séries étaient orientés davantage vers la vie de charité et la vie morale, morale personnelle et morale sociale, cette nouvelle série nous recentre sur Dieu, sur la foi et la vie future. Saint Benoît nous rappelle, comme en d’autres endroits de sa Règle, un fait essentiel qui est la Présence de Dieu en chacun de nous : « savoir avec certitude qu’en tout lieu Dieu nous regarde » (verset 49).
Ce qui pourrait venir immédiatement à l’esprit, c’est l’idée d’un Dieu sévère, un surveillant, un juge impitoyable. On pense alors à Victor Hugo dans Les Châtiments, à propos de Caïn en fuite après le meurtre de son frère Abel : « L’œil était dans la tombe et regardait Caïn ». Non, même si nous sommes pécheurs, c’est un Dieu bon, aimant, miséricordieux qui veille sans cesse sur nous. Ce qui doit nous animer, c’est la foi, car nous sommes fondés sur le Christ, notre rocher, notre Pierre d’angle, pour reprendre une image très biblique et chère aux apôtres Pierre et Paul dans leurs épîtres.
Dieu nous est présent car il veut notre bonheur ; il nous guide et nous encourage, grâce à l’Esprit-Saint, à suivre le Christ, sa Parole vivante, pour nous aider à avancer vers la Vie éternelle. Cette conviction éclaire les instruments proposés dans ce chapitre ; elle nous donne sens même si nous ne les appliquons pas en tout point, vu notre faiblesse. Mais savoir qu’à tout moment et en tout lieu, Dieu, notre Père, est présent, doit nous donner confiance et paix.
Vendredi 21 janvier :
Dans tout ce chapitre, ce qui apparaît nettement c’est l’amour, car tous ces instruments n’en sont que l’expression. Les deux premiers instruments reprennent les deux plus grands commandements de la Loi et de l’évangile : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Tous les autres instruments énumèrent les différentes expressions de l’amour et leur aboutissement qui est de pouvoir rejoindre l’amour que Dieu à d’abord pour nous. Et cet amour de Dieu est signalé dans les derniers instruments : « Dans l’amour du Christ, prier pour ses ennemis ». Ce qui est évoqué ici, c’est l’amour de Jésus en croix offrant sa vie en pardonnant à ses bourreaux : « Père, pardonne leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. »
Dans le dernier instrument, il y a : « Et de la miséricorde de Dieu, ne jamais désespérer ». Autrement dit, le chemin qu’il nous est donné de parcourir, c’est qu’à partir de notre amour pour Dieu et pour le prochain, il nous est donné de découvrir et de recevoir l’amour que Dieu a pour chacun de nous. Or cela n’est possible que parce que Dieu nous a aimé le premier. Amour qui est du commencement au terme de nos vies, et dont l’aboutissement est « cette récompense qu’il a promise : Ce que l’œil n’a pas vu, que l’oreille n’a pas entendu, ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment. »
Ainsi, au lieu d’être une succession de préceptes ennuyeux, tous ces conseils sont au contraire une invitation à nous laisser entraîner dans ce mouvement d’amour pour partager la vie et la joie que Dieu veut nous donner.
CHAPITRE 5 : DE L’OBÉISSANCE.
Samedi 22 janvier :
L’obéissance est d’abord : ’’écoute’, mot que l’on retrouve dès le début du Prologue : « Écoute, ô mon fils, l’invitation du maître, et incline l’oreille de ton cœur». Le but de cette écoute est de « revenir par le labeur de l’obéissance à Celui dont t’avait éloigné la lâcheté de la désobéissance ».
L’obéissance est un acte de foi ; elle est accueil de la Parole de Dieu, et cette Parole est relayée par les enseignements de la Règle et par les ordres du supérieur. Même s’il ne s’agit pas d’ordres arbitraires, il y a toujours pour chacun un appel à se quitter soi-même, à sortir de soi, à renoncer à sa propre volonté et à ses préférences pour accueillir la volonté d’un autre.
Et de l’écoute, on passe à l’exécution de l’ordre. En nous engageant dans la profession monastique, nous avons choisi de suivre le Christ dont nous savons qu’il est le modèle de l’obéissance car il est venu faire la volonté de Celui qui l’a envoyé, ainsi qu’il l’affirme lui-même en reprenant le psaume 39. C’est ce que nous essayons de vivre jour après jour.
Dimanche 23 janvier, dimanche de la semaine œcuménique :
Il y a aujourd’hui dans l’Église une institution qui n’est pas encore très bien perçue, car elle est encore trop récente. En effet, ce troisième dimanche du temps ordinaire a été appelé : ‘’Dimanche de la Parole de Dieu’’. C’est le 30 septembre 2019 que le pape François l’a institué par une exhortation apostolique intitulée : ‘’Aperuit illis’’. Ces mots reprennent ceux de l’évangile de Luc dans le récit de l’apparition de Jésus aux apôtres au Cénacle : « Alors il leur ouvrit l’esprit à l’intelligence des Écritures » (Luc 24, 45). Le choix de la date de cette exhortation n’est pas anodine : le 30 septembre est la fête de saint Jérôme, le grand traducteur de la Bible en latin qui disait : « Ignorer l’Écriture, c’est ignorer le Christ ».
Et voici ce que disait le pape au sujet de ce dimanche de la Parole de Dieu : « J’établis donc que le troisième dimanche du Temps ordinaire soit consacré à la célébration, à la réflexion et à la proclamation de la Parole de Dieu. Ce dimanche de la Parole de Dieu viendra ainsi se situer à un moment opportun de cette période de l’année où nous sommes invités à renforcer les liens avec la communauté juive et à prier pour l’unité des chrétiens. Il ne s’agit pas d’une simple coïncidence temporelle : célébrer le dimanche de la Parole de Dieu exprime une valeur œcuménique, parce que l’Écriture Sainte indique à ceux qui se mettent à son écoute, le chemin à suivre pour parvenir à une unité authentique ».
Ce que le pape montre bien ici, c’est que la Parole de Dieu est le trésor commun de TOUS les chrétiens. Même s’il reste beaucoup à faire pour parvenir à l’unité, déjà nous pouvons écouter et proclamer ensemble la Parole de Dieu et en vivre. C’est ce que nous faisons déjà cette semaine, à notre niveau.