Annonciation (Lc 1, 26-38)

Publié le

Catégorie : Archives

Annonciation – A- 2020

Quel paradoxe ! Le Sauveur du monde, le Fils de Dieu, naissant d’une femme, comme tous les enfants des hommes, et vivant toutes les étapes de la croissance humaine, jusqu’à mourir, mais de quelle mort, l’ignominie d’un condamné, d’un hors la loi ! Sa parole retentit encore, à contre courant du politiquement correct, complètement décalée par rapport aux forces aveugles qui mènent le monde.

La foi des chrétiens résiste encore au rouleau compresseur du progrès, de la modernité, de la mondialisation qui écrase l’humanité, mais pour combien de temps encore ?Nous baignons, nous, dans ce mystère de foi, une foi fondée sur la parole du Christ, éprouvée par une confiance persévérante, malgré mille contradictions et nombre de contradicteurs, fortifiée aussi par des années de fidélité à l’amour qui nous a fait tout quitter pour lui… « Voici que tu vas être enceinte, dit l’ange à Marie, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé fil du Très Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il règnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. »

Saint Jean écrira, nous révélant le sens ultime de la venue de Jésus parmi nous : « A ceux qui ont reçu le Verbe, à ceux qui croient en son nom, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu. » Ne serions-nous pas des rêveurs dangereux ?
Le monde, pendant ce temps, fait pour s’affranchir de Dieu et de son Envoyé, voulant se suffire, se définir par lui-même, rêvant de parvenir à créer la vie et à gouverner l’univers, prétendant assurer le bonheur des hommes et peut-être leur survie. Les catastrophes de ces dernières années, les pronostics les plus alarmistes sur l’avenir de notre planète, les écarts de richesses insoutenables entre le Nord et le Sud, rien n’a pu arrêter cette course au pouvoir, au plaisir, rien n’a pu nous ramener à la raison et à la mesure, à la justice et à la sagesse.

Le virus qui se propage partout, depuis quatre mois, petite chose insaisissable dont personne n’arrive à venir à bout, sauf à rester confiné chez soi, et encore, va-t-il pouvoir nous faire réfléchir ? En attendant, il vient de renverser la statue d’or, de fer, de bronze, de cuivre que le monde a sculptée pour être indestructible.

Nous sommes de ce monde et sommes, nous aussi ébranlés ! Pourtant, le confinement qui est imposé à tous est presque notre état habituel et devrait même nous confirmer dans la conscience que notre vocation est un témoignage vital pour le monde : non que nous ayons des recettes toute faites pour résoudre les questions sociétales qui se posent à notre temps ; mais nous rappelons à tous que l’épanouissement ultime de l’homme est en Dieu, que son ‘ascension’ passe par le Christ, humble, donné, se recevant entièrement de son Père.

C’est, bien sûr, le monde à l’envers, et il faut entendre ce message avec discernement, car l’économie, la politique, la vie sociale, à l’échelle locale et mondiale, obéissent à des lois. Mais la direction nous est donnée par le Christ lui-même, né de Marie : « Qui veut sauvegarder sa vie, la perdra ; mais qui perd sa vie à cause de moi, l’assurera. Quel avantage l’homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il le paie de sa vie. » (Mt 16, 25)

Fr. Paul Emmanuel
Abbé du Bec