Homélie :
En ce dimanche entre l’Ascension et la Pentecôte, l’Église nous invite à persévérer dans la prière, à l’exemple des Apôtres réunis au Cénacle. En cette période où nous attendons l’effusion de l’Esprit Saint, la Parole de Dieu vient éclairer notre chemin. Elle nous rappelle que notre vocation chrétienne n’est pas d’abord une affaire d’efforts humains, mais d’intimité avec le Christ, source de toute unité et de tout amour authentique.
La première lecture nous présente ce que fut la relation personnelle d’Étienne avec Jésus. Il nous donne l’exemple d’un véritable chrétien, fidèle imitateur de Jésus jusque dans sa Passion. En tant que premier martyr, il incarne l’exemple même du disciple qui suit le Christ avec une fidélité radicale, allant jusqu’à reproduire dans sa propre passion les gestes et les paroles de Jésus. Son témoignage montre que la foi chrétienne ne se réduit pas à une simple adhésion intellectuelle à des croyances, mais qu’elle est avant tout une marche concrète à la suite du Seigneur, en conformité avec sa vie et son message.
La réaction d’Étienne face à ses bourreaux est un modèle de pardon et d’amour évangélique. Alors qu’il est lapidé, il prie : « Seigneur, ne leur compte pas ce péché. » Ces paroles font écho à celles de Jésus sur la croix (Lc 23, 34) et révèlent la radicalité de l’amour chrétien. Prier pour ses persécuteurs, c’est participer à la miséricorde divine et refuser la logique de la vengeance. Étienne incarne ainsi la victoire de l’amour sur la haine, une victoire rendue possible par la grâce du Christ.
Ce passage nous interroge aussi sur notre propre témoignage de foi. Sommes-nous capables de rester fermes dans nos convictions, même face à l’incompréhension ou au rejet ? La vie d’Étienne nous rappelle que le témoignage authentique peut exiger des sacrifices, mais qu’il porte toujours du fruit. Comme le dit Tertullien, « le sang des martyrs est semence de chrétiens ». Notre fidélité au Christ, même dans les petites épreuves quotidiennes, contribue à répandre son Royaume.
L’Évangile nous présente la prière de Jésus au Cénacle. Cette prière est la plus longue qu’il a faite dans tous les évangiles. Dans cette prière Jésus dit ce qui lui tenait le plus à cœur au soir du Jeudi Saint. Ce qui était pour lui le plus important : l’unité, comme condition pour que le monde croie. Il a répété 4 fois « Qu’ils soient un ». Le plus grand souci pour des parents à l’heure de la mort, c’est la division de leurs enfants. Jésus, lui aussi, a le souci pour ce qui adviendra après lui.
Jésus prie pour l’unité de tous ses disciples, afin que le monde croie. Cette unité n’est pas une simple organisation humaine, mais un mystère d’amour qui reflète la communion du Père et du Fils. Le Christ nous appelle à être « un », comme Lui est en Dieu, pour que son amour soit visible à travers nous. L’unité que Jésus désire n’est pas le fruit de nos efforts ou de nos compromis, mais un don de l’Esprit Saint qui nous transforme intérieurement. Cette unité est « un miracle » de sa grâce, un reflet de la vie trinitaire où l’amour circule sans fin. Ainsi, notre unité devient un signe visible de la présence de Dieu dans le monde.
Jésus ne prie pas pour une uniformité superficielle, mais pour une communion profonde qui reflète l’amour infini entre le Père et le Fils. En nous unissant à Dieu et les uns aux autres, nous devenons des témoins crédibles de la résurrection. Cette unité, selon le Christ, est un témoignage essentiel pour que le monde puisse croire en la vérité de son message. Sans elle, la mission de l’Église perd sa force et sa crédibilité. Cela nous interpelle sur la qualité de nos relations fraternelles, dans nos familles, nos communautés et l’Église.
Pour répondre à cet appel, nous sommes invités à vivre concrètement la fraternité, à surmonter nos divisions et à nous laisser réconcilier par l’amour du Christ. Cela exige de nous humilité, pardon et disponibilité à marcher ensemble, malgré nos différences. L’unité ne signifie pas la négation de nos diversités, mais leur harmonisation dans la charité, à l’image de la multitude des dons qui servent un seul Corps, celui du Christ. C’est ainsi que nous rendons visible l’amour de Dieu aux yeux du monde.
Dans cette prière, Jésus s’adresse à son Père avec une profonde tendresse et une sollicitude particulière, d’abord pour ses apôtres, puis pour tous ceux qui croiront en Lui grâce à leur témoignage : « Père saint, je ne prie pas seulement pour ceux qui sont là, mais encore pour ceux qui, grâce à leur parole, croiront en moi. Que tous soient un ». En intercédant pour nous, Jésus montre que sa mission ne se limite pas à ses contemporains, mais s’étend à toutes les générations futures, y compris les chrétiens d’aujourd’hui.
En tant que chrétiens, nous sommes directement concernés par cette prière, car c’est grâce à la prédication des apôtres que la foi nous a été transmise. Jésus nous inclut dans son intercession, manifestant ainsi son amour infini et sa volonté de nous voir grandir dans la communion. Cette unité n’est pas optionnelle : elle est un signe essentiel de notre appartenance au Christ. Quand nous vivons cette unité, nous rendons visible au monde l’amour de Dieu et nous devenons des instruments de sa paix.
Dans la deuxième lecture, le Christ ressuscité se présente comme « l’alpha et l’oméga, le premier et le dernier, le commencement et la fin ». Ces paroles résonnent comme une promesse et un appel : Jésus est le commencement et la fin de toute chose, et son retour glorieux est une certitude qui doit orienter notre vie. Dans l’attente de ce jour, nous sommes invités à garder la foi et à persévérer dans l’espérance. Cette attente active nous pousse à vivre dans la sainteté, en gardant nos cœurs tournés vers la Jérusalem céleste où Dieu essuiera toute larme.
En ce 7ème dimanche de Pâques, alors que nous nous préparons à la Pentecôte, demandons à l’Esprit Saint de nous donner la force de témoigner avec courage et amour. Que l’exemple d’Étienne nous inspire pour vivre en disciples missionnaires, ancrés dans la prière et ouverts à la grâce du pardon. Comme lui, gardons les yeux fixés sur le Christ, afin de puiser en lui la force d’aimer sans mesure, même dans les difficultés.
P.Dreyfus, MCCJ